Quand vous dites que vous faites de la communication, on vous regarde sans doute comme le plus grand des traîtres ou comme le pire des arnaqueurs. Et oui, ce métier s’est hissé peu à peu au rang des professions devenues détestables. Peut-être parce qu’il contribue au modèle de surconsommation de nos sociétés favorisées. Peut-être parce qu’il semble englué dans des imaginaires dépassés du bonheur par l’avoir (« de l’avoir plein nos armoires », chantait déjà Souchon il y a 30 ans…).
Réjouissez-vous, vous avez le pouvoir de changer les choses. Vous allez pouvoir retrouver de la fierté à faire ce métier. Mais ça ne se fera pas tout seul, non. Il faudra passer par la case « responsabilité ». La communication responsable, tout le monde en fait, tout le monde en veut, tout le monde en parle. Mais pour le moment, tout le monde n’y arrive pas. Attention, un petit ripolinage vert des campagnes ne suffit pas. Ce greenwashing est toujours présent et le public n’est pas dupe. Il va falloir arrêter maintenant, au risque d’être encore plus détestés.
L’éco-communication, précisons-le, n’est pas le sujet de cette tribune. Éco-concevoir ses campagnes est désormais un passage obligé, mais ce n’est que la face émergée de l’iceberg. C’est du cœur du réacteur dont je parle, de la responsabilité de la mission des entreprises et de celles des offres dont on fait la promotion, donc in fine de la responsabilité des métiers de la communication.
Vous répondrez à juste titre qu’il ne peut y avoir de communication responsable sans marketing responsable, qu'il n'existe pas de marketing responsable sans entreprise responsable et que vous ne pouvez agir que si en amont d’autres ont fait leur job. Si votre annonceur n’est pas responsable, si votre entreprise n’est pas responsable, vous pensez que vous ne pouvez rien faire ou que vous ne pouvez pas changer sans les autres. Mais ne seriez-vous pas en train de faire l’autruche ?
Consommateurs, citoyens et électeurs
Au contraire, vous pouvez contribuer dès à présent à cette mue, sans attendre la fin du parcours, sans vous contenter d’être le bout de la chaîne commerciale, quand tout est joué et qu’il n’y a plus qu’à faire une jolie pub. Pour être plus responsable, il faut convaincre, il faut fédérer, accompagner, changer les comportements. N’est-ce pas exactement ce que vous savez-faire ? Avec vos stratégies, avec vos créations, avec vos dispositifs, mêlez-vous de ce que l’on ne vous confiait pas mais qui vous regarde.
Vous n’êtes pas que des professionnels de la communication, vous êtes aussi consommateurs, citoyens et électeurs. Et, comme les autres consommateurs, citoyens, électeurs, vos aspirations ont changé. Comme les autres, vous voulez des offres respectueuses et soutenables. Comme les autres, vous souhaitez moins mais mieux pour vos enfants. La communication, votre savoir-faire, c’est là votre banderole. Brandissez-la ! Argumentez, séduisez, revendiquez, incitez, provoquez, bousculez de l’intérieur si nécessaire.
Oser, c’est aussi votre métier. La communication a souvent regretté de ne pas être considérée comme suffisamment stratégique, elle a aujourd’hui – et urgemment – l’une des plus belles opportunités de son existence de changer le cours des choses. Communiquer, rendre commun, impliquer, s’impliquer, voilà le beau défi que nous avons collectivement à relever.
C’est ça l’idée de la communication implicative : créer avec les autres, en les écoutant mieux, en adaptant mieux son offre pour porter des projets qui vont réconcilier les organisations avec leurs publics. Et les communicants avec leurs métiers.
Florence Touzé a publié l'ouvrage Marketing, les illusions perdues, paru aux éditions La Mer Salée.