Tribune
Avec la disparition annoncée des cookies tiers, rendre payant l'accès aux contenus n'est pas la seule voie possible. Parmi les solutions, la possibilité pour les internautes de construire un profil anonymisé en ligne leur permettant d’indiquer leurs préférences et que pourraient utiliser les annonceurs.

Le 1er avril dernier, de nouvelles lignes directrices de la Cnil en matière de récolte de consentement aux traqueurs entraient en vigueur. Trois ans après la mise en place du RGPD, les acteurs de l’industrie publicitaire se préparent à présent à la disparition des cookies tiers, qui représentent encore la clef de voûte du ciblage publicitaire. L’équilibre est difficile à trouver entre expérience utilisateur, recueil du consentement explicite et éclairé, et monétisation. Comment préserver l’expérience utilisateur tout en protégeant les données de navigation privée ?

2021 est l’année du consentement, notamment en termes de publicité en ligne. L'importance croissante accordée à la vie privée de l'utilisateur a été le moteur de changements importants dans le secteur de la publicité, qu'il s'agisse du RGPD ou de la suppression imminente des cookies tiers par Google d’ici 2022. Ces bouleversements entraînent l’avènement d’un internet axé sur la protection de la vie privée des internautes, mais qui pourrait de fait devenir de moins en moins accessible et ouvert à tous.

Si aujourd’hui le constat est sans appel, les internautes ont de moins en moins confiance dans la publicité en ligne, et ce n’est pas sans raison. La pratique des pop-up trop agressifs, intrusifs, et mal ciblés, est encore monnaie courante sur le web. C’est d’abord un vaste gâchis en termes de budget, mais aussi une pratique qui engendre un rejet massif de toute publicité, et participe donc à l’installation d’adblockers.

Du point de vue de l’internaute, les CMP sont souvent incompréhensibles, et surtout entravent sévèrement l’expérience en ligne. A chaque page consultée, son pop-up réglementaire sur les cookies, sans véritable choix à la clé. Et si vous refusez, la page devient inaccessible. Depuis le 1er avril, certains sites du groupe Webedia par exemple proposent une option payante en cas de refus du consentement. C’est un pari osé, il sera intéressant d’analyser dans les prochains mois la proportion de refus (fermeture du site) et ceux qui choisiront la version payante. N'existerait-il pas un juste milieu entre ces deux options ?

Impliquer les utilisateurs

Sensibiliser les utilisateurs à l’importance de la publicité dans l’échange de valeur est essentiel. C’est un élément de mieux en mieux compris : notre dernière étude YouGov révèle d’ailleurs que 64% des Français savent que les éditeurs s’appuient sur des publicités pour garantir la gratuité des contenus qu’ils proposent à leurs lecteurs et abonnés. Mais la saturation publicitaire génère des frustrations de part et d'autre. Côté internautes, l'expérience utilisateur dégradée est de moins en moins tolérée dans un monde toujours plus exposé aux écrans. Côté éditeurs, la dépendance aux revenus publicitaires réduit les marges de manœuvre possibles.

Une troisième voie pourrait être celle d'une publicité plus éthique et qualitative, qui permettrait aux éditeurs de renouer le dialogue avec les utilisateurs et de s'inscrire dans une démarche de monétisation durable. Pour développer une publicité plus transparente et durable, et réconcilier les besoins des annonceurs dans un monde post-cookies, il existe des solutions qui donnent la possibilité aux internautes de construire un profil anonymisé en ligne leur permettant d’indiquer leur préférence. Les annonceurs peuvent ainsi bénéficier d'un accès à des données plus précises sur leur audience, générées dans l'appareil de l'utilisateur, tout en conservant l'anonymat complet de l'utilisateur, ce qui augmentera la confiance dans l'écosystème publicitaire.

Pour qu’un internet reste une ressource publique mondiale, gratuite et ouverte à tous, il faut continuer à rechercher la bonne combinaison. C’est le dialogue entre utilisateurs, éditeurs et marques qui permettra de trouver ce précieux équilibre de monétisation en ligne. De cet équilibre dépend la survie d’internet. Entre le «tout paywall» et la mise aux enchères de la vie privée des utilisateurs, un entre deux est encore possible.

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