Tribune
Alors que les consommateurs attendent de plus en plus des marques qu'elles s'interrogent sur leur impact environnemental mais aussi sociétal, le secteur agricole peut être un nouveau terrain d’engagement des entreprises.

Face aux préoccupations grandissantes de la part des consommateurs à la fois sur les enjeux environnementaux et alimentaires, les entreprises s’interrogent sur leur impact écologique comme sociétal. Si les soupçons d’opportunisme pèsent encore sur les engagements avancés - peu d’entre elles ont des ambitions compatibles avec les objectifs des Accords de Paris, selon un rapport d'Oxfam - il n’en demeure pas moins que les marques ont un réel pouvoir de bouger les lignes. Elles disposent d’une forte capacité d’influence quant aux (bonnes) conduites à adopter ; encore faut-il qu’elles se montrent elles-mêmes exemplaires tout à la fois sur le terrain du discours que de l’action. Cette action doit aujourd’hui, plus que jamais, trouver son expression au cœur même du secteur agricole, dont la transition relève de la nécessité.

Durant la dernière décennie, les consommateurs ont affirmé leur volonté de consommer de façon plus durable et 60% des Français considèrent que les entreprises jouent un rôle plus important que le gouvernement dans la création d’un «monde meilleur», d'après un sondage CSA pour Havas Paris. De fait, tant sous l’impulsion des consommateurs que sous la pression des pouvoirs publics, les marques n’ont désormais plus d’autre choix que de s’engager et d’agir.

Afin d’éviter le triste écueil du greenwashing, il n’est désormais plus suffisant pour les entreprises de seulement gommer les impacts négatifs de leur activité. Si jusqu’à présent, changer un seul produit d’une gamme en le rendant plus «green» suffisait, ce temps est révolu. Les marques se doivent d’être proactives dans leurs engagements et mener des actions concrètes pour créer ce «monde d’après». Ce monde attendu des consommateurs se montrent aujourd’hui plus que jamais attentifs et exigeants à l’égard des entreprises : 50% d’entre eux trouvent que les marques ne sont pas assez engagées, et pour celles qui se disent engagées, 70% les considèrent comme n’étant pas sincères, selon une étude Trustpilot.

Replacer le monde agricole au cœur de ses enjeux d’impact

Cette tendance de fond nettement accentuée par la crise de la Covid-19 a remis au cœur du débat des enjeux de souveraineté alimentaire, d’écologie ou d’engagement. Elle doit aussi amener les entreprises à flécher leurs investissements, plutôt qu’à les restreindre, pour répondre efficacement aux défis climatiques et environnementaux. Celles qui réussiront à (re)gagner la confiance des citoyens sont celles qui auront fait le travail profond de redéfinition de leur raison d’être autant que de leur business model.

Dans ce contexte, le secteur agricole doit être un nouveau terrain d’engagement des entreprises. L’agriculture, à la genèse de toute production, s’avère un terrain d’actions évident pour répondre aux enjeux de transformation de nos modes de consommation. Et pour cause : si le secteur agricole est aujourd’hui le 2e poste d’émissions de gaz à effet de serre en France (19% des émissions nationales, selon le ministère de l'Agriculture), il est néanmoins capable d’atténuer le changement climatique par la conservation, la fixation et la substitution du carbone. Autre exemple, 50 000 exploitations produisent déjà 20% des énergies renouvelables françaises, et elles devraient être près de 300 000 à horizon 2050, d'après un rapport parlementaire de juillet 2020.

La transition agricole représente une formidable réponse aux défis environnementaux du siècle. De l’agroalimentaire aux cosmétiques en passant par le tourisme, les entreprises de tous les secteurs doivent désormais replacer le monde agricole au cœur de leurs enjeux d’impact et de leurs désirs d’actions. Le premier niveau d’action se situe au niveau des filières, notamment en offrant aux agriculteurs les outils nécessaires à l’amorçage de leur propre transformation, en particulier un accompagnement technique et financier pour donner vie à leurs projets de transition.

Compensation de la perte de revenu générée par la conversion bio, cofinancement d’une installation de méthaniseur, opportunités commerciales et engagements contractuels responsables, raccourcissement des chaînes logistiques… sont autant d’actions concrètes et efficaces pour incarner enfin, loin des discours, l’engagement des entreprises. Plus qu’une opportunité, elles ont aujourd’hui le devoir moral de s’imposer en tant que leader de cette nécessaire transition agricole, au bénéfice de leur survie, comme de celles de notre environnement.

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