Trop de ghosts pour Hervé
«On ne parle plus de ghost, c'est devenu un sujet has been, il disqualifie automatiquement celui qui l'évoque. Pourtant, quel pourcentage de fausses campagnes dans tous ces lions ? Et en quoi est-ce embarrassant au fond ? Dans la performance de trouver ce qui semble être une bonne idée il y a indéniablement la joie d'avoir su créer un lien entre un vrai produit et un vrai consommateur. Cette idée quand elle est partagée par toute une agence est présentée à un annonceur et si l'annonceur est bon ou que l'agence sait argumenter, elle peut être vendue, au sens propre comme au figuré.
C'est ce qui fait la beauté de ce métier, lorsque quelqu'un qui n'est pas celui qui a trouvé la fameuse idée, va pourtant mettre de l'argent dessus, car il y croit. Avec les fausses campagnes on n'a plus besoin de tout ça, on donne un os à ronger aux créatifs et pendant ce temps-là on laisse la création au marketing et nos écrans sont envahis de déchets toxiques. Il existe désormais deux mondes, le monde virtuel, merveilleux des prix où la publicité est impertinente, audacieuse et créative, et le monde réel où la réclame est affligeante. Dans quel monde voulant nous vivre?»
L'inflation des prix publicitaires au-delà des Cannes Lions, pour Eric, président d'une agence d'intégration
«Il y a (beaucoup) trop de Lions à Cannes, mais surtout, il y a trop de prix publicitaires en général et trop de prix par prix. Les cérémonies sont généralement interminables et les stratégies primées parfois très minces. Le meilleur moyen de valider la légitimité d'un prix consiste à mesurer le poids dans l'assistance de ceux qui ne sont ni des créatifs, ni des primés (agences et annonceurs). C'est souvent révélateur.
Cela fait longtemps que l'inflation des prix dans le monde de la communication a rendu illisible la valeur de la majorité d'entre eux. Il suffit d'ouvrir les sites de l'AACC ou des groupes de communication pour s'en persuader : chacun se vante de ses prouesses créatives grâce à des listes interminables de prix hétéroclites, certaines (bonnes) campagnes multi-primées dépassant parfois la vingtaine de prix (sans même mentionner les fake et les campagnes alibi...). Cela fait penser à l'époque où on achetait aux puces des poignées d'insignes maoïstes en fer blanc ou des barrettes d'insignes de maréchal soviétique ...»
Trop de catégories pour Michael, blogueur
« Il ne s'agit pas de se demander si l'ajout constant de nouvelles catégories est néfaste ou non pour le monde de la publicité. On pourrait argumenter pour dire que l'arrivée de nouvelles catégories, comme Cyber et Titanium, a conduit les agences et annonceurs à penser au-delà du spot TV de 30 secondes pour être en mesure de remplir leur étagère de récompenses dorées.
Désormais, le souci que rencontrent les jurés des nombreuses catégories des Cannes Lions est surtout de savoir si telle ou telle campagne correspond effectivement à la catégorie en question. Cette année, il y a pléthore d'exemples de campagnes inscrites dans différentes catégories et remportant des prix pour des disciplines qui pouvaient paraître éloignées du sujet de l'opération à l'origine. On pense bien évidemment à l'affichage British Airways, qui remporte le Grand Prix dans la catégorie Direct.
À ce stade, on est en droit de penser que les organisateurs du festival ne vont pas introduire la révolution que tout le monde attend, c'est-à-dire la suppression pure et simple des catégories au profit d'une catégorie unique, qui viserait à récompenser la créativité pure.
Pour finir, il faut encore une fois noter que l'édition 2014 du festival publicitaire n'a pas vu l'inscription en compétition de la meilleure opération de l'année, Lego Movie, qui constitue l'objet de brand content par excellence, Tout comme «Red Bull Stratos» ne l'avait pas été l'an dernier.»
Les Cannes Lions, un concours agricole qui ne veut froisser personne pour Maxime, étudiant
«Est-ce réellement une compétition, ou plus une sorte de concours agricole avec à peine plus de concurrents que de catégories, histoire de remercier tout le monde et de ne froisser personne ?
Les organisateurs ont la possibilité de mettre en lumière des campagnes qui ont réussi à faire sourire des millions de gens (cf la campagne Coca au Pérou par exemple), mais préfèrent se remercier entre eux et alimenter les fantasmes liés à ce cercle fermé qu'est le monde de la pub...
Au final, il est difficile de voir qui ressort vraiment du lot. Un palmarès (beaucoup) plus resserré ne mettrait-il pas d'avantage les lauréats en valeur ? Ne nous permettrait-il pas de découvrir leur travail, ce qui constituerait une vraie reconnaissance ?»
Un lieu de cooptation pour Christian, directeur associé d'une agence
« En tant que chef d'entreprise, travaillant en marge de la pub, je me suis toujours étonné de voir des créateurs de slogan aussi peu clairvoyants pour le positionnement de leur propre marché. On a le sentiment que les Cannes Lions est le lieu de la cooptation entre personnes du même milieu. A force, cela n'aura plus de sens »
Bientôt le prix du Meilleur Prix ? Anonyme
«Il faut bien que chacun morde une part du gâteau de peur que leurs dents s'émoussent ! Récompenser 17 catégories... Il ne nous reste plus qu'à attendre le Prix du meilleur animateur de brainstorming, le Grand Prix du meilleur burn-out de l'année et la médaille du meilleur stagiaire. Ah, et le Prix du Meilleur Prix, évidemment.»