Julia Drupt, fondatrice, et Bertrand Espitalier, directeur développement de l'agence Le Fil, posent une question centrale.

La révolution digitale a eu lieu, elle a ouvert un fabuleux champ des possibles. Désormais, si on s'en donne les moyens, il est facile de cibler les actions marketing de manière extrêmement fine, d'analyser l'impact des campagnes de communication de façon très pointue. Les solutions de marketing automation, les techniques de retargeting permettent un tracking exceptionnel. Bref, tout ce dont les marketeurs ont toujours rêvé est à portée de main. Dans une vision business, c'est une mine d'or.

Mais une approche utilitaire du digital est loin d'être suffisante. Dans le contexte de concurrence actuel et avec la maturité́ digitale des clients B to B, les seules entreprises qui tireront leur épingle du jeu seront celles qui auront travaillé en profondeur le statut de leur marque B to B. Une étude de CEB pour Google a montré que ce travail était un avantage concurrentiel: l'acheteur lui prêtera plus d'attention, il aura plus d'intention d'achat et sera même prêt à payer plus pour une marque B to B.

Or, c'est là que le bas blesse: à se concentrer sur des solutions digitales de marketing B to B, la marque est la grande oubliée. Trop souvent seule l'offre produit ou de service est valorisée, la dimension émotionnelle est passée sous silence et la dimension symbolique (avec la vision, la croisade de marque) est carrément inexistante. Et pourtant ces deux dimensions intangibles sont essentielles dans la proposition de la marque B to B. Comme le dit Jean-Noël Kapferer: «Quand l'intangible fait défaut, ce n'est plus une marque au sens strict, mais le nom d'un produit. La dimension émotionnelle et symbolique permet de distinguer le produit de la marque.»

A ceux qui pensent encore qu'émotion et symbolique sont indésirables quand on parle de B to B, l'étude de CEB-Google nous enjoint de passer de «la promotion à l'émotion en connectant les clients B to B aux marques». Alors, la marque B to B sera-t-elle la grande perdante de l'ère digitale?

Saf-instant, marque de levure sêche instantanée pour les boulangers (groupe Lesaffre International) a montré qu'une marque B to B pouvait faire vivre aux professionnels un moment de poésie dans un voyage onirique (http://bit.ly/1o3KsWS). Cisco a dépassé son statut de fournisseur pour réseau pour entraîner son public dans sa croisade «Internet of everywhere» et finalement transformer l'humanité. SAS Institute propose bien plus qu'une solution de «business analytics», mais nous permet de nous hisser au rang des dieux en nous donnant «The Power to know».

Ces quelques exemples devraient inspirer les marketeurs pour travailler l'essence de leur marque B to B. Une fois ce travail fait, le digital est un boulevard pour s'exprimer, engager des conversations, gérer des contacts et faire du business. Mais se jeter tête baissée dans le digital sans travailler l'essentiel ne mènera pas très loin. Et rappelons au passage qu'une offre de bonne qualité et la satisfaction client ne sont pas un positionnement, pas même une promesse. C'est un pré-requis, un minimum.

Quelle est ma vision de marque B to B? Quel positionnement réellement différenciant pour sortir des sentiers battus? Quel rôle, quelle croisade pour ma marque B to B? Et, finalement, en quoi le monde sera différent avec ma marque B to B? Seuls ceux qui auront l'ambition ou le courage de répondre à ces questions pourront gagner et tirer le maximum de notre ère digitale.

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