Toutes les données convergent: le public récuse la publicité sur Internet et trouve que la Toile est saturée de messages parasites. Pire, selon ce même sondage réalisé par l'Ifop pour Adyoulike en juin 2013, 17% la jugent néfaste. Les applications et boîtiers qui filtrent la publicité sur les sites se multiplient, provoquant même la création d'applications censées les neutraliser! Dans ce contexte où le message ne trouve grâce que s'il apporte un «gros avantage financier», le commerce veut accroître sa présence en display et sur les réseaux sociaux. Est-ce vraiment le meilleur choix?
La pertinence stratégique consiste aussi à se trouver là où les autres ne sont pas ou à y être différemment. Or, tout le monde joue dans le même sens et cherche à faire cliquer l'internaute, puis à convertir l'internaute-visiteur en client, souvent à coup de promotions coûteuses ou d'événements parfois très éloignés de ses préoccupations (les études montrent, sauf rares exceptions, que les clients se sentent plus proches des produits achetés que des marques). Le «Web-to-store» s'est ainsi emparé du commerce qui, en se généralisant, annule en grande partie ses effets…
Dès lors, une réflexion prend tout son sens, en particulier pour les centres commerciaux: ils réunissent des clients réguliers qui, partageant la fréquentation du centre, de ses boutiques et des environs, ont beaucoup de choses à partager entre eux. Le champ ainsi ouvert est vaste, ambitieux et prometteur, car porteur de sens et créateur de lien, donc d'avenir. Ici l'espace commercial s'offre à ses clients pour qu'ils le transforment en vrai lieu de vie, de rencontre, et d'échange, qu'ils se l'approprient.
La nouveauté tient aussi à la prise d'initiative qui leur revient. Des outils simples permettent de leur redonner ici et maintenant la parole sans intermédiation ni technologie compliquée ou intrusive. Les systèmes «double screen» seront obligatoirement à l'honneur: un petit écran tactile et ergonomique pour rentrer ses informations, un écran géant au-dessus pour les diffuser dans le centre. Des demandes de cours de maths ou de cuisine, des partenaires de jeu de poker ou de tennis, des offres de petits travaux, des rendez-vous pour une rencontre, des échanges de produits d'occasion, des propositions de garde d'enfant, des offres et des demandes de covoiturage, des locations de matériel, des cours de danse ou de musique, des musiciens pour un concert, des volontaires pour porter les courses…
Tous les services et occasions de rencontre entre individus pourront passer par cette nouvelle forme de communication in situ et de visu. Une base de données sera renseignée par le diffuseur d'annonce lui-même qui s'enregistrera avant d'écrire son texte. Une «data» essentielle pour les centres et leurs clients enseignes, et qui permettra de faire circuler l'annonce aussi sur l'application mobile du centre (et qui le cas échéant permettra de stopper les messages indésirables). Une plate-forme conviviale autogérée par type d'offre et par date de validité et de «péremption» assurera le service après-vente des annonces et le lien entre tous les membres volontaires.
Une autre façon, donc, d'utiliser le Web pour les centres commerciaux, sans être intrusifs tout en étant extrêmement présents. Rien n'empêchera les boutiques du centre d'utiliser à leur tour ce nouveau mode immédiat d'information pour des ventes flash, des jeux ou des évènements en cours.
Ainsi, face à des réseaux d'affichage dynamique installés dans les centres «premium» et commandés par en haut (les annonceurs présents sont nationaux et parfois absents des centres commerciaux), il s'agit de proposer la vraie démocratie, la plus légitime, celle qui permet à tous de s'exprimer, une revanche pour tous les centres commerciaux qui sont déclarés non-prioritaires en équipement par les grands afficheurs et qui trouvent ainsi un moyen d'animation et de fidélisation totalement maîtrisables. Une belle complémentarité pour les autres.