Depuis quelques mois, le concept du «native advertising» anime le débat sur l'avenir de la publicité digitale aux Etats-Unis, et il fait son apparition en France avec le lancement des premières offres «native» sur le marché. Le «native», c'est le nouveau mot pour parler de la stratégie qui consiste à intégrer la publicité de la manière la plus harmonieuse possible dans le contenu d'un site sans perturber l'expérience de l'utilisateur. Cela recouvre des approches existantes comme le publi-éditorial ou encore la création de format spécifique à un site ou un environnement, tels les tweets sponsorisés sur Twitter.

Rien de révolutionnaire, mais au-delà du «buzz word», les promoteurs du «native» ont le mérite d'ouvrir le débat sur les limites de l'offre publicitaire digitale, et il est temps: les formats et les emplacements standards définis il y après de vingt ans n'ont peu ou pas évolué alors que le Web a connu de nombreuses révolutions, comme l'émergence des médias sociaux ou l'explosion de la vidéo. Le «native» soulève quatre questions clés pour l'avenir de la publicité digitale.

La question de l'attention. Plusieurs études récentes ont démontré que les bandeaux et autres pavés publicitaires étaient devenus trop prévisibles pour capter l'attention de l'utilisateur: même s'ils sont affichés à l'écran, ils sont dans la majorité des cas ignorés par les internautes, ces derniers détournant leur regard des zones de la page habituellement réservées à la publicité. C'est le phénomène du «banner blindness», révélé par Jakob Nielsen dans une étude publiée en 1997. Pour y remédier, plusieurs voies se dessinent. L'une consiste à placer les formats en dehors des zones réservées: soit au cœur du contenu, comme le propose le «native», soit à la marge du site, ce que propose par exemple We Spread avec le format E-tab. L'autre est d'utiliser des formats intrusifs qui se superposent au contenu ou interrompent la navigation sur le modèle de l'écran publicitaire. Mais ceci n'est pas sans dommage pour l'annonceur. En forçant l'attention des utilisateurs, les marques risquent d'alimenter le sentiment de rejet que les internautes peuvent éprouver lorsqu'ils perdent le contrôle de leur navigation.

La question de l'engagement. A l'inverse, l'approche du native vise à créer autant d'engagement pour la publicité que l'utilisateur peut en avoir pour le contenu, sans perturber sa navigation. Pour cela, il faut naturellement que le contenu soit de qualité et corresponde aux attentes de l'internaute. La deuxième condition, c'est de laisser l'initiative à l'internaute, celle de déclencher la visualisation d'une vidéo, de la «skipper» ou de la partager. Mais il est possible d'aller plus loin dans l'implication, en lui laissant le choix de la publicité, comme c'est le cas avec le format Captiview, de Bee Ad. L'annonceur se verra alors récompenser par une meilleure efficacité de sa communication, comme le prouve les résultats de l'étude The Pool de Vivaki, qui a démontré la puissance de ce levier.

La question du contexte. A l'heure où une partie des investissements se déplace vers l'achat d'audience sans considération du support, le «native» mise sur le contexte. C'est par exemple le placements de vidéos publicitaires au cœur des blogs les plus influents en relation avec le thème de campagne, telle une bande-annonce de film sur un blog cinéma. Au lieu d'être perçue comme une publicité, la vidéo contribue à enrichir le contenu et s'intègre parfaitement dans le parcours de navigation du visiteur. Et cela fonctionne. Selon une étude conduite par Sharethrough et Nielsen aux Etats Unis sur cinq campagnes vidéo, les formats vidéo natives ont eu un impact très supérieur au format pré-roll sur les indicateurs de «branding». (…)

La question de la frontière entre contenu et publicité. Contrairement au publi-éditorial, les contenus «native» sont produits par les journalistes. De nombreuses voix dans la profession se sont élevées contre ce mélange des genres, tandis que d'autres, comme Forbes, présentent le «native» comme une planche de salut pour les éditeurs toujours à la recherche de nouvelles sources de revenus. Avec le «native», la publicité est une forme de contenu parmi d'autres, ce qui met à mal le cadre de mesure tel qu'il est défini aujourd'hui en France par Médiamétrie. L'institut ne prend pas en compte le contenu publicitaire dans son périmètre. Ainsi, par exemple, les internautes qui regardent des vidéos publicitaires dans un «player» comme celui d'Ebuzzing ne sont pas comptabilisés dans l'audience vidéo.

Si le «native», en soi, n'est pas une révolution, il nous invite à nous interroger sur les fondamentaux de la publicité sur Internet et à prendre acte de la nécessité de nous réinventer. Il est en cela est une excellente nouvelle!

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