Si InVivo et Teract ont finalement renoncé à se rapprocher de Casino, ils sont encore nombreux à se pencher sur le destin du distributeur lourdement endetté: conciliateurs nommés par la justice, créanciers, potentiels repreneurs, direction actuelle...

Casino déchaîne les convoitises. Les potentiels acheteurs, les créanciers et la direction en place vont tenter de s'entendre dans les quatre mois de la procédure de conciliation ouverte le 2 juin par le tribunal de commerce de Paris. Intermarché a déjà obtenu ce qu'il voulait: le 26 mai, Casino, qui emploie 200.000 personnes dans le monde dont plus de 50.000 en France, s'est engagé à lui céder une grosse centaine de magasins dans l'Hexagone. Troisième distributeur français, Intermarché entend aussi participer à un « futur tour de table » pour recapitaliser Casino mais à un petit niveau (100 millions d'euros). Les deux groupes ont dès à présent renforcé leurs partenariats en matière d'approvisionnements.

L'union de coopératives agricoles InVivo est encore moins concernée par le destin de Casino: après des mois de discussions, le mastodonte agro-industriel et sa filiale Teract ont annoncé jeudi qu'ils abandonnaient leur projet de rapprochement.

Jean-Charles Naouri, acteur de la conciliation

Quelle marge de manoeuvre pour la direction actuelle? Le tribunal de commerce a nommé deux conciliateurs, Aurélie Perdereau et Marc Sénéchal, pour renégocier une dette abyssale (6,4 milliards d'euros pour Casino et 3 milliards environ pour sa maison-mère Rallye) même si le conseil d'administration de Casino est toujours aux commandes du distributeur.

Le PDG de Casino Jean-Charles Naouri entend rester l'un des acteurs majeurs de cette conciliation. Cette dernière et l'accord avec Intermarché « participent de notre stratégie pour construire l'avenir de Casino », a-t-il écrit dans un récent courrier aux salariés du groupe. Depuis toutefois, le dirigeant de 74 ans a passé une journée en garde à vue dans une affaire de manipulation de cours et délits d'initié présumés. S'il a finalement été remis en liberté sans charge retenue contre lui à ce stade, son image en a été affectée.

Des créanciers détenteurs de la dette

Grandes banques, fonds d'investissement, acteurs institutionnels... Qui voudra convertir les créances en capital d'un distributeur en difficulté? Qui va tout perdre? Qui pourra remettre au pot? Le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, qui entend prendre le contrôle de Casino, a proposé à certains créanciers de tirer un trait sur une partie de la dette en échange, soit de liquidités, soit d'actions, soit des deux. Et ce, à hauteur d'environ 40% des créances.

De nouvelles cessions d'actifs, notamment en Amérique latine ou le e-commerçant CDiscount, pourraient aussi contribuer au désendettement. Selon plusieurs sources, certains créanciers de Casino sont également détenteurs de dette au niveau des sociétés holding qui font elles aussi l'objet d'une procédure de conciliation. Pour eux, les pertes pourraient être encore plus significatives.

Dans ce dossier très sensible, les conciliateurs ont pour mission d'assurer la pérennité du groupe Casino, dans une forme qui reste à déterminer. « La question pour eux n'est pas de savoir dans l'absolu combien il faudrait écraser de dette mais combien le groupe va générer de liquidités » pour pérenniser son activité et faire face aux échéances futures, observe un connaisseur du dossier auprès de l'AFP. Ils disposent de quatre mois, plus un optionnel, pour trouver un accord satisfaisant pour tous, sous le regard inquiet des salariés, la CGT appelant les décideurs politiques à « éviter la casse sociale ».

Des prétendants en pagaille

Outre son offre aux créanciers, Daniel Kretinsky a proposé une augmentation de capital de quelque 750 millions d'euros qui ferait de lui le principal actionnaire de Casino. Cette offre, conditionnée à une réduction très importante du poids de la dette pesant sur le distributeur, est à l'étude dans le cadre de la procédure de conciliation.

En parallèle, trois des cofondateurs de Teract, Xavier Niel (Free), le banquier d'affaires Matthieu Pigasse et le spécialiste de la distribution Moez-Alexandre Zouari, ont décidé, en leur nom et après le départ d'InVivo, de créer un véhicule financier abondé à hauteur de 300 millions d'euros pour monter au capital de Casino. Ils appellent d'autres acteurs à se joindre à eux.

Selon Le Figaro, Auchan se serait invité dans les discussions en proposant une fusion avec le groupe Casino une fois conclue l'éventuelle prise de contrôle du distributeur en difficulté par M. Kretinsky. Les Echos affirment eux que le distributeur nordiste aurait également approché le trio Niel-Pigasse-Zouari. Sollicités par l'AFP, l'Association familiale Mulliez (propriétaire d'Auchan) et Auchan France n'ont pas souhaité faire de commentaire.

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