La Convention citoyenne puis le projet de loi Climat et résilience ont pointé le transport aérien, notamment courte distance, comme l’un des secteurs émetteurs de CO2 qu’il fallait réguler. Comment réagit Air France ?
Catherine Villar. Le transport aérien souffre, dans l’esprit du public, d’une image qui est fausse, l’ensemble du secteur ne représentant que 2 à 3 % des émissions de CO2. Cependant, Air France est une compagnie engagée et prend sa part de responsabilité dans la baisse nécessaire de ces émissions. Nous n’avons pas attendu la Convention citoyenne ou le projet de loi Climat et résilience pour cela. Depuis 25 ans, nous proposons une alternative « train + air » lorsque cela est possible. Depuis janvier 2020, dans le cadre du plan Air France Horizon 2030, qui vise une baisse de 50 % de nos émissions de CO2 par rapport à 2005 et une neutralité carbone de nos opérations au sol, nous compensons intégralement les émissions de CO2 de nos vols domestiques, via des projets certifiés par des organismes reconnus.
Concrètement, quelles sont les principales mesures de réduction menées par Air France ?
Cela fait des années que nous luttons contre le poids excessif. Tout d’abord, avec les constructeurs, dans la conception même de nos avions : les matériaux de structure, les sièges, par exemple, ont été allégés. La première mesure consiste donc à maintenir nos investissements pour moderniser notre flotte aérienne. Nos futurs A350 et A220 émettent 25% de CO2 et génèrent jusqu’à 40% de nuisances sonores de moins que leurs prédécesseurs. Mais voyager responsable, cela passe aussi par la prise de conscience de nos clients des enjeux de réduction de poids. Pour optimiser la masse embarquée tout en leur permettant de garder le choix des repas, nous testons la possibilité d’une précommande en Business. L’objectif est de réduire de 20% le poids des repas embarqués. Cela permet également de lutter contre le gâchis alimentaire, ce qui est une autre forme de responsabilité. Nous étudions aussi la possibilité de transmettre à nos clients les trucs et astuces de nos équipages pour voyager plus léger.
Quelles sont les attentes des clients d’Air France en matière de responsabilité sociale et environnementale ?
Les préoccupations de responsabilité sociale et environnementale avaient montré une belle dynamique ces dernières années, notamment auprès de nos clients européens. Air France a ainsi remplacé en 2019 les plastiques à usage unique, avec des gobelets désormais en carton et des couverts en bois. Cela représente 210 millions d’articles, soit 1 300 tonnes de plastique. Mais la Covid a mis ces priorités sous cloche et il a fallu s’adapter. Le socle des attentes de nos clients, c’est la sécurité. Et depuis la crise, on a assisté à un bouleversement avec l’émergence des conditions sanitaires à la deuxième place de leurs exigences. Notre métier, c’est de réunir les gens, de leur permettre de rencontrer l’autre. Or la Covid a envoyé le message que le danger, c’était l’autre. C’est pour cela que nous avons mis en place le programme Air France Protect afin de sécuriser le parcours client. Nous avons dû rassurer nos voyageurs en mettant en lumière, par exemple, que les cabines d’avion sont des espaces très sûrs, équipés de filtres High-efficiency particulate air (HEPA), identiques à ceux des blocs opératoires, qui captent 99,9 % des particules et renouvellent l’air toutes les trois minutes.
La RSE nécessite d’intégrer des contraintes dans la fonction achats. Comment se déroulent vos échanges avec ce service au sein d’Air France ?
La dimension RSE est toujours présente au sein de la direction de l’expérience client, quel que soit le produit ou le service proposé. Nous travaillons bien évidemment main dans la main avec les achats, qui font en permanence du sourcing, de la veille innovation, pour trouver les solutions adaptées à nos contraintes et à l’exigence de nos clients. Mais, avec 104 millions de passagers transportés par an, le groupe Air France-KLM n’est jamais dans le temps court, nos volumes ne le permettent pas. Et nous ne pouvons pas dans certains domaines aller aussi loin que nous le souhaiterions. En matière de carburant par exemple, il n’est pas possible de passer intégralement au biofioul, car il n’y a tout simplement pas les capacités pour fournir toutes les compagnies aériennes. Pour autant, nous nous sommes engagés à ce qu’en 2025 notre carburant contienne 2 % de carburant durable.
Qu’en est-il du volet social de votre politique RSE ?
Je suis extrêmement fière de travailler pour Air France, car c’est une entreprise bienveillante. Elle s’est engagée depuis longtemps en matière d’égalité des sexes. Air France compte 7 % de femmes parmi ses pilotes (contre 5,18 % en moyenne). Nous profitons de la Journée internationale des droits des femmes, le 8 mars, pour mettre en avant des équipes navigantes exclusivement féminines. En matière d’égalité des chances, nous avons aussi de nombreuses actions pour favoriser la formation en alternance, notamment en ce qui concerne le personnel de bord.
Comment s’est manifesté l’engagement social de votre compagnie lors de la crise de la Covid ?
Nous avons tendance à dire qu’Air France, c’est le meilleur de la France ; cela passe évidemment par notre engagement lors d’événements majeurs. À l’occasion de la crise, l’entreprise a montré l’importance de cet engagement et la très forte mobilisation de ses personnels. Lors du premier confinement, nous avons rapatrié 250 000 Français résidant à travers le monde, quasiment du jour au lendemain. Nous avons aussi mis en place des ponts aériens pour importer des masques ou des respirateurs en urgence, mais aussi, plus récemment, des vaccins.
Alors que le transport aérien était dans le viseur de la Convention citoyenne pour le climat, Catherine Villar, directrice de l’expérience client d’Air France, rappelle que les actions du groupe pour réduire ses émissions de CO2 sont anciennes. Sur le volet social, la compagnie est aussi engagée pour l’égalité des sexes et des chances.