Quel futur pour la télévision ? La mort programmée ? Beaucoup lui prédisent un funeste destin à l’heure où smartphones, tablettes, ordinateurs et consoles de jeux changent considérablement nos habitudes. Fini, par exemple, la grand-messe du 20 heures. Les programmes de rendez-vous ne font plus recette. La télé, désormais, c’est quand on veut et où l’on veut. A la vitesse du haut débit, la révolution internet est passée par là, prête à tout engloutir. Et ce n’est qu’un début. L’émergence de nouveaux acteurs aux bouquets de contenus illimités, tels Netflix, menacent les chaînes. Quant au téléviseur au milieu du salon, son trône vacille. Débordé par les écrans, il n’est plus qu’une option parmi d’autres pour accéder aux contenus de divertissement multimédia.

Mort et enterré, notre bon vieux téléviseur ? Jean-Luc Chétrit, président de l’agence de conseil média Carat France et François Druel, professeur associé de marketing et d’innovation au sein de l’école d’ingénieurs Istia, ne veulent pas céder à l’engouement apocalyptique. Dans La télévision est morte… vive ma télévision !, les deux auteurs dessinent les contours d’une « télé-caméléon » en train de naître sous la forme d’un « écran total » interconnecté avec tous les écrans et personnalisé. « La » télévision devient ainsi « ma » télévision. Un paysage audiovisuel que chacun se construit et où « nous devenons tous patrons de chaîne, programmateurs et vidéastes ». Une révolution copernicienne dans le monde des médias, mais où la télévision a toujours une place.

Nullement cannibalisé par les petits écrans (tablettes, mobiles, consoles) qui offrent une expérience individualiste et personnalisée, le téléviseur reste, selon eux, un « écran-écrin » aux vertus plus sociales. Il offre des rendez-vous ritualisés qui continueront de fonctionner, notamment pour les événements live ou les soirées thématiques. Éclairé par les témoignages de grands décideurs du secteur tels Nonce Paolini, PDG du groupe TF1, Alain Weill, PDG de Next Radio TV, Nicolas de Tavernost, président du directoire du groupe M6 ou Rodolphe Belmer, directeur général du groupe Canal +, l’ouvrage dresse un état des lieux des invasions numériques qui bouleversent le média audiovisuel. Les effets des box multimédia, des services en ligne, des nouveaux usages et comportements y sont auscultés.

L’ouvrage est aussi conçu comme un guide d’action et de survie pour les annonceurs et les publicitaires. Entre autres conseils : passer de la publicité purement imposée à la publicité choisie et adapter les créations aux écrans. « L’erreur serait de penser que le public attend de la publicité, écrivent les auteurs. Or c’est exactement l’inverse. Il faut arrêter le bombardement massif et passer aux frappes chirurgicales. » 

Enfin, les auteurs nous livrent une vision prospective de ce que pourrait être la télévision de demain. Le scénario de disparition des chaînes ? Peu probable. à l’horizon 2018, les programmes en direct (information, sport, divertissement) représenteront encore 80 % de la consommation télévisuelle des 15-24 ans, rappellent-ils. Et même si l’audience des chaînes historiques décroît, elles devraient toujours peser près de 55 % de part d’audience en 2018. Les chaînes vont donc, pour les auteurs, résister au tsunami internet. « Ma télévision est un socle de socialisation. Ouverte, elle se partage et se socialise via les réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter », expliquent-ils. Ils pronostiquent cependant une internationalisation des chaînes et surtout des chaînes réinventées qui, à la différence de pure players comme Netflix, ne travaillent pas sur des algorithmes de recommandation automatique des contenus mais sur leur expertise de programmation. Un enjeu majeur. Comment en effet valoriser et mettre en avant ce vrai savoir-faire d’assemblage de programmes , s’interrogent-ils. Et d’imaginer des « coachs en divertissement audiovisuel » capables de conseiller des programmes selon les envies et les goûts de chacun, des « stars de la profession », expertes dans l’art de dénicher des contenus étonnants, amusants ou extraordinaires ou encore des services de conseil en programmes sur le web contre abonnement, ou des playlists personnalisées. Pourquoi pas ?

La télévision est morte… vive ma télévision !,
de Jean-Louis Chétrit et François Druel, éditions Télémaque, 2014, 192 pages, 14 €.

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