Ressources humaines
Le site américain Zappos renonce aux offres d’emplois et mise sur le social pour trouver ses nouvelles recrues. Une révolution qui signe le retour de l’humain dans l’embauche.

Adieu les offres d'emploi. Le 29 mai dernier, le site e-commerce américain Zappos a fait un choix radical: il ne publiera plus d'annonces. Et pourtant il compte recruter 450 personnes cette année. Pour y parvenir, il misera uniquement sur son réseau social «Insider». «Le principe est simple: il devient un Insider, créé du lien avec les employés, échange avec eux, décrypte Jean-Noël Chaintreuil, expert en ressources humaines. Les employés le notent, via des mises en situation, des simulations... Si un salarié de Zappos estime que le candidat en vaut la peine, il l'intègre dans le pipeline d'embauche.» Cette forme de recrutement participatif est une réponse intelligente aux robots recruteurs, et donc une vraie révolution dans les méthodes d'embauche, car elle permet aussi de s'assurer que la personne correspond à la culture de l'entreprise.

Depuis une quinzaine d'années les groupes investissent des millions d'euros dans des logiciels de gestion des candidatures de plus en plus perfectionnés pour faire face à un flux de candidatures toujours grandissant. Sans trop de succès pour les candidats qui se plaignent de cette industrialisation et cette déshumanisation des processus d'embauche.
Avec l'initiative de Zappos, c'est bien l'humain qui reprend la main dans le recrutement. Cela s'inscrit dans la droite ligne des salariés-ambassadeurs de leur entreprise sur les réseaux sociaux, lesquels vont parfois jusqu'à jouer le rôle d'intermédiaires dans la sélection des candidats. «C'est l'avènement du community management RH dont l'idée est d'utiliser le réseau des employés pour recruter», confirme Grégory Herbé, fondateur de la solution de recrutement social My job company. D'ailleurs Facebook a recruté un «head of referral recruitment» (responsable du recrutement par cooptation).

Un défi inédit

Chez Prisma média (1 100 salariés) «il y a un problème d'adaptation des candidatures à nos besoins, parmi les plus de 6600 candidatures reçues en 2013, il y a beaucoup de CV de journalistes “print”, constate Philippe Pouzeratte, DRH et de l'environnement professionnel de Prisma média et président de la commission sociale du Syndicat des éditeurs la presse magazine (SEPM). Et ce flux de CV est croissant. Nous disposons d'un logiciel de gestion de candidatures, qui réalise des tris pertinents par critère mais cela ne fonctionne pas pour tous les postes, en particulier sur les nouvelles fonctions numériques.» Résultat, Prisma média, engagé dans une campagne de recrutement de développeurs (20 depuis le début de l'année), mise aussi sur d'autres méthodes: «Beaucoup de nos développeurs sont arrivés chez nous grâce à notre système de cooptation interne, pour lequel les salariés reçoivent des primes de 500 à 1500 euros, se targue Philippe Pouzeratte. Il faut que l'on dispose d'une filière de recrutement qui ne soit pas régie uniquement par des robots, en particulier pour trouver les profils numériques, souvent atypiques ou autodidactes. Idem pour les postes managériaux.»

Le recrutement social, c'est justement le crédo de My Job Company. «Le fonctionnement est simple, explique Grégory Herbé, cofondateur de la start-up: les membres inscrits partagent les offres d'emplois auprès de leur réseau et si une personne est recrutée grâce à eux, ils touchent une prime de cooptation. Nous venons de lancer une offre destinée aux entreprises qui permet d'engager leurs salariés dans une communication RH auprès de leur réseau et de les récompenser à travers un serious game.»
Une chose est sûre, les groupes devront continuer d'innover dans le recrutement car ils sont confrontés à un défi inédit:  recruter des professionnels moins sur leurs compétences actuelles que sur leur capacité d'adaptation future, à chaque virage important, tous les deux-trois ans. Or cette qualité d'adaptation est par définition difficilement prédictible. Pour l'instant. «Aux Etats-Unis la société de neurosciences Prophecy scienties prétend prévoir les comportements des candidats face à l'évolution de leur culture d'entreprise», note Jean-Noël Chaintreuil. Une trop belle promesse?

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