Tribune
Loin de signer leur mort, le basculement vers un monde numérique plus sobre permet aux agences digitales d'inventer un nouveau chemin créatif.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, liker des stories est en passe de devenir plus polluant que de monter dans un avion. L’empreinte du numérique pourrait atteindre 6,7% des émissions de gaz à effet de serre de la France d’ici 2040, soit plus que le secteur aérien avant covid. Le digital ne serait-il donc pas la solution d’un monde qui doit faire attention à tout ? Exit les agences digitales dont le job est d’aider les clients à créer les nouveaux produits digitaux de demain ? Sommes-nous condamnés à travailler à notre propre disparition ?

Bien sûr que non. Le digital est une arme d’innovation massive. C’est dans son ADN. La responsabilité écologique en devient juste l'un des aiguillons. Le digital n’était déjà plus une vitrine mais un service rendu. Il est aujourd’hui invité à la table des moyens qui permettront aux entreprises de penser leur impact social et environnemental, et de proposer des usages plus adaptés à un monde aux ressources planétaires finies.

Les agences digitales peuvent contribuer à accélérer le mouvement. Car les agences n’ont par nature pas peur de la complexité. Si la sobriété numérique est un sujet en apparence complexe, son horizon est bien dans la simplification. Simplifier les enjeux pour se concentrer sur le besoin utilisateur, simplifier la façon de travailler avec les clients et partenaires pour gagner en efficience, simplifier le parcours du consommateur, en évitant les requêtes inutiles, les contenus pléthoriques et les fonctionnalités « non essentielles ». La simplicité induite par la sobriété numérique sert ainsi la performance et l’usage. Elle devient même un curseur qui permet d’effectuer les bons arbitrages entre ce qui est bon pour les clients, bon pour l’utilisateur et bon pour la planète.

Faire mieux avec moins

Car créer des expériences intégrées est notre cœur de métier. La sobriété numérique est un sujet d’expérience digitale globale : c’est l’ensemble du cycle de vie du produit digital qui est concerné et toutes les disciplines qui sont impliquées. L’UX s’assurera de la pertinence des produits et services digitaux en posant la question de l’usage. La création relèvera le challenge d’une « création sous contrainte » qui implique de faire mieux avec moins. Quant à la tech, il s’agira surtout de proposer des services performants sur un maximum d’appareils et de technologies, afin de permettre aux utilisateurs de profiter au mieux de leurs appareils existants et ainsi limiter le ré-achat d’outils plus performants.

Enfin car nous avons l’immense pouvoir – et la responsabilité – de rendre désirables des comportements vertueux. C’est bien de cela dont il s’agit quand on sait que 70% des Français ignorent le concept de sobriété numérique alors qu’ils sont 86% à déclarer faire attention à limiter leur impact environnemental au quotidien, selon un sondage Odoxa.

C’est donc le bon moment pour faire évoluer le rapport que nous avons au digital en rendant visible la pollution invisible, en rendant désirable ce dont la technique est capable, en faisant adopter de nouveaux standards à nos clients et leurs consommateurs. Plutôt que de démolir et tout reconstruire, bâtissons sur l’existant, réparons-le, augmentons-le, et puis exposons sobrement les efforts consentis et les résultats obtenus. Plutôt qu’obéir aux seules mesures de panier moyen et de temps passé par page, évaluons sa performance digitale aussi à l’aune de sa consommation énergétique.

Les agences digitales ne prônent pas le tout digital. Nous ne vivons pas à côté de nos pompes et les geeks en nous sommes stimulés par cette sujétion à la nature. Bref, la sobriété numérique, à l’inverse d’une condamnation, marque l’heureux renouveau des agences de marketing digital. À nous d’inventer la créativité qui va avec !

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