Tribune
Pour augmenter leur retour sur investissement et trouver de nouveaux leviers de croissance, les directeurs marketing ne doivent pas hésiter à davantage recourir à l'analyse de données.

Le volume et la vélocité des données obligent les annonceurs à repenser leurs processus de décision. La quantité de données est telle que l’enjeu des directeurs marketing, média ou expérience client n’est plus aujourd’hui de chercher la matière première, mais de savoir où porter leur attention. Une approche jamais simple si l’on veut utiliser le potentiel de la data pour maintenir sa position de leader, ou tout simplement rester dans le jeu.

Si la prise de conscience est là, les approches analytiques sont encore très désorganisées, traitées en silos, voire chaotiques. La priorisation des chantiers reste le maillon faible: structuration et historisation des données, choix des sujets data à industrialiser… En créant des passerelles entre business et données, la data science soutient la vision à long terme, mais apporte aussi des réponses sur la mise en œuvre.

Selon le magazine Forbes, les dirigeants marketing les plus innovants ayant investi dans des approches data-driven ont vu leur ROI marketing augmenter d’au moins 5%, et ont accru leur performance de plus de 7%. La plupart de ces marketeurs s’appuient sur une approche statistique de leur marketing mix pour identifier les facteurs de succès et d’échec, les impacts online et offline, et bâtir des scénarios prédictifs.

 

Allier excellence analytique et approche business

La data science s’appuie sur l’analyse avancée des données pour optimiser l’existant ou créer de nouveaux leviers de croissance. Souvent décrite comme une expertise analytique, elle ne fonctionne à plein régime que lorsque la compréhension business est parfaitement maitrisée. La difficulté est de trouver des profils qui allient à la fois excellence analytique et approche business. Cette capacité est rare chez les data scientists, si l’on en croit le directeur marketing d’une marque internationale de robots ménagers. Au-delà de la casquette de statisticien, le rôle de «traducteur» puis de «storyteller» est crucial pour réussir à faire passer ses recommandations auprès des dirigeants marketing, souvent peu matures sur ces sujets.

Dans les organisations traditionnelles, l’expérience, l’ancienneté, le pouvoir hiérarchique sont survalorisés. Or s’appuyer sur l’avis d’une personne unique ou d’un expert historique peut comporter des risques. En fournissant des données tangibles et mesurables, la data science permet d’installer de nouveaux réflexes: convaincre par la preuve. Sans tomber dans l’écueil du tout data ou du tout intuition, mêler expérience et données est la façon la plus performante d’avancer sur le terrain. L’industrie du luxe a parfaitement compris ce combo gagnant en faisant cohabiter l’expérience des équipes, la vision d’un designer de renom pour l’image de marque, avec une approche analytique quand il s’agit d’optimiser le merchandising ou les ventes en magasins.

 

Plus de clarté et de pragmatisme

En posant les bonnes questions, le data scientist permet de décomposer les processus de décision et de faire émerger les dysfonctionnements, usages ou conventions métier, parfois toxiques pour le ROI. La data science remet en question les certitudes, les avis d’expert et la manière de travailler. Cela peut être un challenge pour les dirigeants marketing et leurs équipes, mais salutaire tant la démarche data-driven améliore significativement la performance.

Le volume de données, la puissance technologique permettent aujourd’hui de creuser vite et loin, amenant plus de clarté et de pragmatisme aux processus de décision: comprendre ce qu’on fait et comment on le fait. La modélisation statistique du marketing mix explique par exemple le volume de ventes, le chiffre d'affaire d'une marque, ou d'une gamme de produit, en fonction des différents leviers (TV, digital, prix, promotion, lancement produit, trade marketing...). Cela permet aux directeurs marketing d’isoler les ROI, les leviers de croissance, et de réallouer leur budget là où ça compte. La data prospective s’appuie elle sur le passé, pour mieux comprendre le futur. Juge de paix neutre, elle permet de confirmer ou d’infirmer ses intuitions, de scénariser ses hypothèses, d’analyser les signaux faibles pour anticiper les risques.

 

Rassembler les gens

Eparpillée dans chaque coin de l’entreprise, la donnée a le pouvoir de rassembler les gens autour d’un projet commun. Créer un data lake et rationnaliser les investissements média obligent à rallier les équipes impliquées autour de la table, afin de collecter les données nécessaires, construire des KPI communs ou un cahier des charges lisible par tous. Bon gré mal gré, travailler sur un projet data science contraint donc à limiter les querelles de clochers, et à collaborer là où les silos régnaient (entre IT et marketing, entre central et pays…). Difficile à mettre en place, cet antidote est très porteur car il permet de réintroduire des mécaniques d’intelligence collective, contribuant sur le long terme à infuser des dynamiques vertueuses dans toute l’organisation.

Manipulée avec vision, la data science est bien plus qu’un outil d’analyses. C’est un levier de transformation puissant, encore sous-utilisé en France. Pour parvenir à l’exploiter à sa juste valeur, les annonceurs doivent éviter deux écueils: celui de s’enfermer dans des outils techniques sans objectif à long terme, et celui consistant à poser une vision data, sans apporter le mode d’emploi.

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