Le reach n’atteint plus. Les e-influenceurs n’influencent plus. La bulle spéculative de certains réseaux sociaux menace d’exploser. Et pourtant, 2015 sera l’année des e-PR. Voilà la belle équation à laquelle sont confrontées les directions de la communication à l’heure de présenter la énième version de leur budget. Cette équation comporte une inconnue supplémentaire: l’explosion du coût de contact. Les agences de RP, de leur côté, sont plongées dans des réflexions sans fin sur la transcription française des PR à l’anglo-saxonne. Réveillés de ces débats, que faisons-nous, nous, agences de communication corporate, pour accompagner réellement nos clients? C’est-à-dire leur proposer une valeur ajoutée et non penser à leur «vendre» un produit packagé à la hâte pour répondre aux concurrents hipsters du moment.
La solution se cache certainement à l’intérieur des entreprises. La communication interne est l’avenir de la communication d’influence. L’«employee engagement» constitue une arme redoutable et sous-exploitée dans la bataille de la réputation. C’est parce que les employés se sentent détenteurs d’une part de l’entreprise, de ses succès et de ses échecs qu’ils peuvent la promouvoir et la défendre efficacement. La responsabilisation individuelle à tous les niveaux, y compris dans les instances de représentations des salariés, passe par le dialogue, la pédagogie et l’ouverture. Aux newsletters internes et autres messages du président doivent venir se greffer des outils «easy to share». Partager renforce le sentiment d’appartenance à une communauté. Diffuser démontre sa fierté de travailler pour l’entreprise. Trop souvent, les chartes d’utilisation des médias sociaux se fondent encore sur la défiance et la crainte: «faites attention à ce que vous diffusez et partagez», «faites attention lorsque vous parlez de l’entreprise», etc.
La peur n’a jamais créé une dynamique. Il est temps de renverser la table et de miser sur le bon sens des collaborateurs, qui ont conscience des dangers intrinsèques liés aux réseaux sociaux. Cela nécessite un minimum de lâcher prise, d'accepter que l’information partagée ne soit pas à la virgule près le message validé, que certaines imprécisions existent. En un mot que le collaborateur s’approprie la communication! Son post aura alors la force que peu de discours corporate et qu’aucun influenceur ne possèdent: la conviction et la crédibilité. Que dire enfin du pouvoir des collaborateurs pour atténuer les effets d’une crise ou d’une rumeur qui se propage par chaîne d'e-mails ou sur les murs des réseaux sociaux? Le collaborateur engagé, conscient de l’intérêt général de l’entreprise et libéré du joug des «social media guidelines» répressives représente l’avenir pour la communication d’influence.
Un nouveau contrat social
Pour chaque entreprise, le chantier culturel est immense. Il s’agit de casser de vieilles habitudes et la traditionnelle norme selon laquelle la diffusion de l’information se fait verticalement. Demain, les informations externes se propageront principalement depuis la base. Les conversations seront menées volontairement par chaque individu, sans timing préétabli et sans validation. Il s’agit d’inventer dès maintenant un nouveau contrat social au sein des entreprises. Ce contrat se fondera sur des valeurs fortes: le libre-arbitre (c’est-à-dire la liberté de participer ou non à la démarche), l’égalité (nous sommes tous porte-parole) et l’intérêt général de l’entreprise. Ce bouleversement culturel représente une perte de contrôle. C’est effrayant, certes. Mais c’est le moyen le plus efficace de prendre part à la conversation.
Car soyons clairs: nous sommes acceptés dans une conversation parce que nous y sommes invités et non parce que nous nous y imposons. Dans une entreprise, seul l’individu, le collaborateur a la capacité à être invité ou à inviter. L’organisation ou le porte-parole désincarné n’a pas ou peu de légitimité. Ce nouveau contrat social s’imposera car c’est le seul qui puisse prétendre efficacement répondre aux enjeux actuels: la multiplication des espaces de discussions et l’accélération continue de la propagation de l’information. Une organisation capable de s’engager dans cette démarche et de la promouvoir aura certainement un coup d’avance pour attirer et, surtout, retenir les talents des générations Y suivantes. Là aussi, un beau défi !