TRIBUNE

Plutôt que de chercher à les interdire, mieux vaut voir la fantastique portée éducative des deepfakes et apprendre à détecter ce type de vidéos virales.

Relancée avec l’apparition des faux comptes « Amandine Le Pen » ou « Léna Maréchal », qui font la promotion de l’extrême droite sur TikTok, la question des deepfakes ne cesse d’alimenter le débat public. Ces fausses vidéos générées par l’intelligence artificielle polarisent les critiques : nombreux sont ceux qui appellent à leur interdiction pure et simple. Et si l’on prenait le temps d’analyser les enjeux de ce contenu particulièrement viral ?

Les deepfakes ne sont pas un phénomène nouveau. Leur popularité a explosé avec l'avènement de TikTok, réseau social où ils règnent depuis en maître depuis deux ans. Tout part d’une vaste blague d’un utilisateur de Reddit, qui s’amuse à détourner les paroles de personnalités publiques. Ni plus ni moins qu’un mème 2.0. Très vite, le phénomène prend de l’ampleur et la technologie devient accessible à tous en quelques clics.

Le problème : certains utilisateurs sont tellement performants qu’il devient beaucoup plus difficile de reconnaître le vrai du faux. Et lorsqu’ils sont entre des mains mal intentionnées, les deepfakes mènent à des escroqueries de plusieurs millions de dollars, un faux appel à cesser le feu de la part du président ukrainien et de fausses images pornographiques qui envahissent les réseaux sociaux et questionnent très clairement le consentement.

Est-ce qu'il faut réguler la création et la diffusion des deepfakes ? Incontestablement. Est-ce que condamner à mort tous les deepfakes revient à appliquer une politique de boomers ? Affirmatif.

Les deepfakes font partie de la vie social media

En France, nous sommes les champions de l’interdiction prématurée, surtout lorsqu’un phénomène fait peur – comme ce fut le cas avec les téléphones portables à l'école. Mais interdire les deepfakes n’aurait aucun sens : selon une étude menée par la chercheuse Nina Schick, experte en intelligence artificielle, 90% du contenu en ligne sera généré par l’IA d’ici 2026. Vous pourrez bien vouloir l’ignorer, c’est trop tard, la machine est lancée et, qu’on le veuille ou non, les deepfakes font maintenant partie de notre paysage social media.

Plutôt que de tirer à boulets rouges sur ces contenus, il convient de souligner les atouts de cette technologie, en rappelant notamment leur fantastique portée éducative. Imaginez un peu : Einsten qui raconte « lui-même » ses découvertes, Joséphine Backer qui partage son histoire, ou Roosevelt qui témoigne sur l’impact de son handicap invisible. L’éducation nationale et les médias ont tout à gagner à investir ces formats et à les enrichir de données vérifiées ou sourcées.

Pensez au potentiel et aux moyens que l’on pourrait donner aux associations et aux pouvoirs publics dans leur quête de sensibilisation. Le deepfake, c’est aussi l’opportunité d’offrir une expérience ou une projection pour ouvrir le débat. Arrêtons d’essayer de nager à contre-courant et saisissons l’opportunité de surfer la vague de la meilleure des manières.

Savoir reconnaître un deepfake

Ce n’est donc pas le deepfake qui doit être condamné en tant que tel, mais plutôt son intention qui doit être questionnée – et ce à chaque visionnage. Encore faut-il savoir le reconnaître. Il existe des astuces simples qui permettent de détecter 90% des contenus : si, par exemple, vous observez une trop grande variation de teint ou encore une façon un peu trop mécanique de bouger les lèvres, il est fort possible que vous ayez affaire à un deepfake.

Pour vous en assurer, n’hésitez pas à zoomer pour examiner la texture de la peau et les dimensions du visage. Optez enfin pour une résolution élevée afin de traquer les artifices et n’oubliez pas de ralentir la vidéo pour identifier les transitions maladroites. Et pour les 10% restants, ça se passe dans les écoles, dans les médias mais également sur TikTok. Pour preuve, la vidéo de sensibilisation d’un faux Obama qui a fait un carton.

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