Retail
Personne n’en doute, la crise va changer les usages. Mais si la livraison s’est imposée à toutes les marques et enseignes de retail au nom du quoi qu’il en coûte, son prix élevé pose toujours question.

Drive piéton, livraison à domicile, ship from store, click & collect… la livraison a été la planche de salut de nombreuses marques et enseignes dites « non essentielles ». Et sur ce terrain, tout ce qui pouvait être tenté l’a été ces derniers mois. « Objectivement, il s’est passé quelque chose de formidable, estime Rodolphe Bonnasse, PDG de CA Com Groupe, spécialisé dans le retail : des distributeurs et des commerçants sont devenus agiles, à l’image de Picard qui livre désormais toute la France à domicile. Preuve qu’il existe donc des gisements de créativité à partir de ce qui était un dispositif de survie. De leur côté, les consommateurs n’ont pas eu d’autre choix que celui de considérer les solutions de distribution alternatives, plus locales. »

Le tout pour le plus grand bonheur des professionnels de la livraison, à l’image de Deliver.ee, spécialisé dans le ship from store (livraison e-commerce au départ du magasin) qui prévoit un doublement de son chiffre d’affaires entre 2020 et 2021. Créée en 2013, la société livre aujourd’hui en France et en Europe pour le compte de plus de 300 marques par tous les modes de livraison (vélo, scooter, camionnette, camion…) : « Plus personne n’y échappe, c’est le « nouveau normal », résume Michael Lévy, CEO de Deliver.ee. Le fait que 80% des produits consommés sont achetés en magasin dans un rayon de 10km autour de chez soi nous permet de proposer n’importe quel type de livraison, grâce à un partenariat avec 250 professionnels (transporteurs, coursiers…) en moins de deux heures ou sur rendez-vous, pour n’importe quel type de besoin, de la boite de chocolat à l’arbre de 3 mètres ! »

Ainsi s’explique aussi le développement des « dark stores » d’enseignes, ces entrepôts de centre-ville pour être au plus près des clients en s’appuyant sur leurs propres coursiers. Une idée intéressante qui pose néanmoins quelques questions : « l’expérience est incroyable mais elle n’est pas tenable économiquement car il faut pouvoir disposer d’entrepôts dans tous les centre-villes, où le foncier coûte cher, prévient Michael Lévy. Même avec toute la robotisation qu’on peut imaginer, cela ne sera jamais rentable. » Un vrai paradoxe à l’heure où bon nombre d’enseignes proposent d’offrir la course. « Faire croire que la livraison est gratuite est une erreur et pose la question de la responsabilité, de l’éthique », prévient Renaud Montin, directeur Marketing et Digital de Gemo. Lequel préfère aborder le sujet autrement : « La crise nous a montré que les gens pouvaient vivre en consommant moins, que certaines marques n’étaient pas essentielles. Nous devons être utiles aux clients, capables de toujours pouvoir leur dire oui via une offre omnicanal (magasin, e-commerce…) assortie du mode de livraison le plus approprié. Mais il ne faut pas se tromper, nos magasins réalisent 95 % de notre CA et restent le premier lieu de la relation. » Comme quoi, on n’est jamais aussi bien servi (et livré) que par soi-même !

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