Sur quel constat avez-vous créé Konexio ?
Jean Guo. En menant des études quantitatives et des entretiens dans le cadre de mes recherches [Stanford et Harvard] sur l’inclusion, j’ai découvert qu’il existait beaucoup de solutions pour les publics vulnérables comme les migrants. Mais j’ai vu, quand je suis arrivée en France en 2015, qu’il y avait des solutions de première ligne sur l’alimentation, le logement et la santé mais plus autant pour les étapes d’après comme l’apprentissage de compétences et l’insertion professionnelle. Konexio est né de ce constat et de la volonté d’aider ces publics à se former. Lorsque j’étais consultante dans la Silicon Valley, j’ai pris conscience que nous étions entrés dans une nouvelle ère dans laquelle le numérique est comme une langue de base universelle qu’il faut maîtriser pour s’intégrer. Avec la crise, on a demandé à des gens de maîtriser des outils numériques du jour au lendemain ce qui risque de mettre une partie de la population de côté. Notre mission est d’aider tout le monde à avoir les mêmes chances.
De quels moyens disposez-vous pour aider ces personnes ?
Nous avons la chance d’avoir un solide réseau de partenaires, des acteurs publics, entreprises et acteurs de l’ESS, ce qui fait que les apprenants ne payent pas. L’objectif est que cela bénéficie aux entreprises et qu’à l’issue des formations, elles puissent trouver des talents. Nous avons donc un double enjeu de communication : promouvoir nos formations et nos talents.
Quel intérêt ont ces entreprises de vous aider ?
Il est multiple. Pour certaines, ça rentre en ligne avec leurs objectifs RSE. Pour d’autres, il s’agit de soutenir l’employabilité des jeunes ou juste de trouver des talents. Cela va du grand groupe comme Thales à la petite start-up à Station F.
Quel est votre modèle économique ?
Nous pouvons bénéficier de financements dans le cadre de dispositifs de formation comme l’Opco et, selon le niveau et la durée du programme, nous pouvons recevoir des subventions. Nous sommes de plus en plus sollicités par des acteurs B to B qui doivent se digitaliser, comme des entreprises de BTP ou de nettoyage par exemple, et qui vont nous demander de l'aide pour former leurs équipes.
Comment choisissez-vous les personnes éligibles à vos formations ?
Historiquement, il s’agit de primo-arrivants comme des réfugiés ou des migrants mais aujourd’hui, nous touchons un public plus large : des jeunes de quartiers prioritaires, des chômeurs en reconversion professionnelle ou des personnes sous-représentées dans le numérique comme les femmes.
Est-ce que la crise a accentué la demande en formation ?
Nous voyons une augmentation du nombre de démarches et de processus qui se font désormais en ligne et non plus en présentiel. En parallèle, l’OCDE dit que nous avons perdu dix ans de progrès en matière d’insertion des jeunes. Il y a donc de forts enjeux économiques. Nous avons été consultés par le secrétaire d’État au Numérique Cédric O pendant le premier confinement. Nous avons déjà formé 1 400 personnes et notre objectif est d'atteindre les 10 000 d'ici à 2023.