Le 28 février a pris fin l'opération de l'enseigne de magasins britannique Selfridges qui proposait aux clients un parcours sans logo ni musique pour s'extirper des sollicitations publicitaires omniprésentes.

«Offrir un moment de paix et de tranquillité dans un monde qui nous bombarde d'informations et de stimulations.» Telle était la promesse de l'opération «No Noise» qui s'est terminée le 28 février, et que la chaîne de grands magasins britanniques Selfridges a menée depuis le 11 janvier dans ses enseignes de Londres, Birmingham et Manchester. Adieu donc logos, musique assourdissante et brouhaha de conversations téléphoniques.

Tout commence avec le  «Quiet Shop», un corner enfermé dans sa bulle de verre au fond du magasin Selfridges d'Oxford Street, la rue la plus commerçante de Londres. Isolé des allées bondées, il recèle une multitude de produits mythiques démarqués. Selfridges donne le ton avec un sac anonyme spécialement édité pour l'occasion. Des carnets Moleskine aux jeans Levi's en passant par les écouteurs Beats by Dre, tous les noms des marques ont été effacés, même si les objets restent facilement identifiables. Pour celles qui ont fait le pari que leur design et leur logo suffiraient à rendre leur produit reconnaissable, le défi est relevé.

Heinz a ainsi spécialement édité sa bouteille de ketchup en verre à 557 exemplaires démarqués. «J'envisage cette initiative comme un happening qui est là pour amuser», analyse Claude Nahon, président de l'agence de marketing sensoriel Mood Media Europe, qui y voit un bon coup de pub. Mais le conceptuel fait-il vendre?», ajoute-t-il dubitatif.

Selfridges ne souhaitant pas communiquer sur les résultats de l'opération, difficile d'en mesurer l'impact. Aux premières loges, les vendeuses livrent toutefois quelques informations: «Les visiteurs achètent surtout les produits les plus iconiques, comme le ketchup Heinz. Ce qui a particulièrement bien marché, ce sont les coussins Muji, mais pour ce qui est de la mode, je ne pourrais pas vraiment dire si cela a fonctionné.» Et pour cause, avec un ketchup (en rupture de stock) à 2,95 livres (3,40 euros) et un cale-nuque à 7,95 livres (9 euros), Heinz et Muji proposent les produits les plus abordables de ce Quiet Shop, dans lequel trônent aussi une édition limitée d'un pot Crème de la mer, à 190 livres (220 euros), et un pantalon Acne à 975 livres (1 130 euros).

Ce serait donc plus l'occasion pour les consommateurs de s'approprier un objet collector à moindre coût (quoique plus cher qu'une version classique) que de soutenir des valeurs de consommation réfléchie prônées par Selfridges, qui semblent antinomiques dans ce temple de la consommation.

Entre silence et méditation

Mais l'opération ne s'arrête pas à un espace de vente qui casse les codes habituels, car Selfridges a imaginé un véritable «parcours de la paix» au sein de ses magasins qui grouillent de visiteurs. Au sous-sol, la «Silence Room», imaginée en 1909 par le fondateur Harry Gordon Selfridge, a été remise à l'ordre et au goût du jour par l'architecte Alex Cochrane. Cet espace de relaxation, aux banquettes de feutre et à l'ambiance tamisée, n'est accessible qu'après s'être délesté de ses chaussures et de son téléphone portable. Avec quelque 6 000 visiteurs au compteur de cette pièce silencieuse et de multiples animations comme des cours de méditation ou des performances artistiques, l'enseigne a fait grand bruit dans l'univers de la distribution. Un beau coup de publicité donc, bien plus qu'un engagement…

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