Les marques doivent-elles choisir entre fin du monde et fin du mois ? Selon l'étude Citizen Brands, leur engagement en faveur des enjeux de la société s'avère également bon pour le business.
L’équilibre a mauvaise presse. Qu’il s’agisse de l’équilibre des comptes publics ou du juste équilibre des stoïciens, qu’il s’agisse de finance ou de philosophie, l’équilibre n’est plus à la fête. L’époque est aux extrêmes. La polarisation rassure. Plus nette, plus tranchée. Prête à penser.
L’accélération technologique renforce le phénomène. Lors d’un échange récent avec François Bitouzet, le patron de VivaTech me lançait, l’œil rieur, que l’IA nous avait fait rentrer dans une époque où tout était devenu possible : « Les derniers pourraient être les premiers et les premiers pourraient être les derniers. » Il parlait évidemment de la confrontation des colosses Microsoft et Google. Alors qu’il y a encore trois ans on donnait l’entreprise de Bill Gates décrochée, le miracle OpenAI a doublé la valeur de Microsoft en moins de deux ans, alors que Google était relégué au banc des remplaçants, spectateur de sa stagnation boursière. Fin de l’acte 2, donc, pour une pièce dont la fin n’est sans doute pas écrite, mais où l’on se doute bien que les mouvements extrêmes perdureront…
Le design inspire le progrès
Il y a quelques semaines, nous lancions le réseau de branding et de design du Groupe Havas – Conran Design Groupe – dont la raison d’être se résume à une idée simple : que le rôle du design est d’inspirer le progrès. D’autres l’auront écrit ailleurs avec plus de talent, mais rappelons que le dessein du design est évidemment holistique, et que sa finalité est toujours d’améliorer le cadre et les conditions de la vie humaine. Qu’il existe une relation étroite entre progrès technologique et progrès social. Alors… compte tenu des enjeux collectifs que sont les nôtres, peut-on vraiment laisser la notion de progrès aux extrêmes et à la polarisation ?
Pour les marques, la tentation est forte. Le monde dans lequel nous sommes entrés depuis 2020 – celui que les dirigeants de Davos surnomment celui de la « permacrise » avec son lot d’inflation, de chaînes logistiques disruptées, de croissance molle – pose des questions très concrètes. Faut-il tout miser sur le pouvoir d’achat, à l’exclusion du reste ? Réussir son quarter est-il encore compatible avec les engagements sociétaux que j’ai déjà pris ? En somme, le contexte de crise oblige-t-il vraiment les marques à choisir entre fin du monde et fin du mois ?
C’est la question à laquelle nous avons essayé de répondre avec notre étude Citizen Brands. Nous avons fait parler plusieurs centaines de professionnels de la marque, ainsi que des investisseurs. Nous avons également interrogé un échantillon de 5 300 consommateurs – en France, aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Arabie saoudite et en Inde. Nous leurs avons demandé ce qu’ils attendaient des marques, et lesquelles, pour eux, répondaient déjà à leurs attentes. Puis nous avons croisé avec la performance économique et financière des marques en question.
Du sens et de la croissance
Nous avons découvert que l’équilibre est source de performance. Par équilibre, nous parlons des marques qui, chacune dans leur propre catégorie, savent proposer en même temps de la performance individuelle pour le consommateur (innovation, nouveauté, fiabilité) et de la performance collective ou sociétale (inclusivité, durabilité, contribution).
En moyenne, les vingt marques les plus équilibrées du classement – les plus « Citizen » – surperformaient leurs concurrentes de 37% en termes de croissance et de chiffre d’affaires. Et ce top 20 voyait son cours en Bourse augmenter en moyenne de 93 % au cours des cinq dernières années, contre seulement 17 % pour les marques du bas de classement.
Alors… assumons de ne pas être à la mode ! Cherchons nos nouveaux équilibres – c’est bon pour les marques, les consommateurs et la société dans son ensemble.