L’accélération de la transformation des entreprises nourrit la demande de coaching individuel mais aussi collectif. Trouver ses marques dans un nouvel environnement n’a rien d’évident. Le coach peut aider les équipes au milieu du gué.
Le coaching est souvent vu comme un outil d’accompagnement de dirigeants ou de cadres supérieurs soucieux de performance individuelle. Or ce peut être aussi un remède à un mal collectif. « Certains signaux faibles doivent alerter les responsables, explique Nathalie Barbet-Baker, directrice d’un centre de formation. Des signaux comme la baisse de performance ou d’engagement, le manque de coopération entre les membres d’une équipe ou une moindre énergie dans le travail. »
Quoi qu’il en soit, c’est aussi un auxiliaire utile pour faciliter l’acceptation d’un changement. Un coaching peut être envisagé pour une personne qui a besoin d’être accompagnée pour atteindre un objectif particulier, démarrer dans une nouvelle fonction, ou encore prendre une nouvelle dimension. Dans ce dernier cas, il peut même devenir un outil de fidélisation, souligne Nathalie Barbet Baker : « Proposer un coaching à quelqu’un de compétent, en phase avec les valeurs de l’entreprise, pour qu’il soit plus performant et serein, c’est le fidéliser. »
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Mais comment faire accepter l’idée même d’une telle pratique à quelqu’un qui n’en ressent pas forcément le besoin ? S’il n’a rien de solennel, le coaching invite le salarié concerné à un processus de transformation. D’où un formalisme à respecter, explique Mylena Ljubic, consultante et coach de dirigeants : « Lorsqu’une entreprise propose un coaching à un manager, le cadrage se passe à trois : le manager, son supérieur et le coach. C’est l’étape d’évaluation et d’identification des objectifs que le manager doit atteindre pour réussir. Certaines entreprises proposent à la personne coachée de rencontrer plusieurs coachs afin de lui laisser un choix. »
Une fois le processus lancé, la trame habituelle d’un coaching commence par une première étape : « Il s’agit d’abord de faire alliance, de créer une qualité relationnelle, de se donner un cadre de travail et des objectifs, explique Patrick Dugois, coach de dirigeants. Quitte parfois à s’engager ensuite dans une relation de confrontation, par exemple, pour poser une question du type : comment vous y prenez-vous pour ne pas réussir mieux que vous ne le faites ? Cela ouvre un espace de questionnement sur : que voudrait dire "réussir mieux" ? Est-ce que ce serait être plus à l’aise avec la même performance, ou obtenir une meilleure performance, ou augmenter le niveau de coopération ? Cela amène à revoir le "why". Cette alliance a pour but de se donner un cadre de travail et des objectifs. Ensuite, vient un travail sur la coopération et les obstacles qui se situent sur le chemin : s’agit-il de croyances limitantes, de représentations, etc. »
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Le coaching d’équipe présente des enjeux différents. « lls sont souvent liés à la transformation des organisations, affirme Mylena Ljubic. Cela peut impacter un codir par exemple et l’amener à travailler sur sa raison d’être et sur une nouvelle feuille de route dans le cadre de cette transformation. » Cela implique souvent revoir l’organisation et le mode de fonctionnement.
« Dans l’après-covid, beaucoup d’entreprises ont dû travailler sur la cohérence (vers quoi aller) et la cohésion des équipes (comment y aller) pour développer leur performance, explique la coach. Il peut y avoir une perte de sens, alors une fois la nouvelle vision posée, il faut mener tout un travail de projection et de visualisation pour que l’équipe définisse son utilité par rapport à cette vision. » Dans ce mouvement, se produisent aussi une révision de ce que l’équipe va faire plus ou moins différemment pour nourrir sa raison d’être, et une refonte de sa feuille de route qui sera ensuite validée par le manager ou le dirigeant.
Si un coaching individuel se déroule sur six mois, à raison d’une session de deux heures tous les quinze jours, un coaching collectif s’étend sur une durée de trois mois avec, en moyenne, quatre workshops et des travaux intermédiaires.
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Comment se mesurent les résultats ? « L’évolution de la dynamique d’un groupe peut être une première dimension, indique Nathalie Barbet Baker, tout comme la réduction des tensions qui peuvent avoir un impact sur la performance de l’équipe. » Mais ce sont surtout les évolutions des comportements qui signalent la réussite, précise Patrick Dugois : « L’objectif final du coaching est d’amener les personnes à plus d’autonomie et de responsabilité. L’un des critères de succès est de voir les gens prendre des initiatives. Dès lors que tout ne passe plus par le manager, qui peut se placer alors dans un mode de régulation, les membres de l’équipe se sentent mieux ».
Le manager arrive en effet à renoncer à être au centre de tout, accepte une forme de parité avec les membres de son équipe. Bref, il souffle et fait souffler ses collaborateurs en sortant de l’hypercontrôle même s’il garde des moments d’arbitrage. « Il faut aboutir à ce que ce soit la vision qu’a l’équipe de son travail qui serve de régulateur afin que le manager puisse se décentrer, être plus en observation, en soutien et en stratégie », conclut le coach.
Sylvie Ray-Hugues, dirigeante de R&H Conseil, passe en revue les trois stades par lesquels passe une équipe grâce à un coaching
« Le coaching d’équipe a pour but de développer la maturité d’une équipe. Une équipe peut se caractériser selon trois stades. Dans le premier, elle est simplement un groupe d’individus dans lequel le responsable est un donneur d’ordre. Avec un accompagnement, elle peut atteindre le second stade, celui de groupe solidaire où il y a une écoute, une réciprocité qui permet de créer des liens entre les membres. Le manager peut alors se centrer sur les relations et la dynamique de groupe. Le troisième stade est celui de l’équipe performante où les gens se connaissent, peuvent occuper d’autres places que la leur, il y a une fluidité entre les membres, tandis que le manager peut se centrer sur le sens, la cohérence et le partage. Le coaching collectif vise cette dernière étape à travers un travail d’intelligence collective qui développe la capacité à co-construire et élaborer des solutions efficaces. La puissance du coaching d’équipe réside dans ce qu’il peut apporter au plan individuel et a aussi une dimension personnelle. Il permet à chacun de comprendre comment il fonctionne, quelles sont ses forces et ses limites, et de comprendre ses propres réactions face aux autres. Chacun peut alors mieux se développer, en accord avec lui-même. »