Sport
Le métier a évolué ces dernières années sous la pression des clubs, qui ont fermé leurs portes aux journalistes sportifs. Du coup, l’accès à l'information est passé entre les mains des agents.

Paris-Saint-Germain contre Montpellier. Le choc des deux premiers clubs de la Ligue 1, dimanche 19 février au Parc des Princes, a attiré quelques centaines de journalistes. Comme d'habitude, après le match, ce fut la foire d'empoigne dans la zone mixte, cet espace, situé au sous-sol du Parc. Les joueurs y rencontrent les journalistes… refoulés derrière des barrières de sécurité.

Plus question, en effet, pour ceux-ci d'approcher de trop près les footballeurs. Les anciens se souviennent qu'il n'y a pas si longtemps, les interviews se faisaient dans les vestiaires et que les soirées se terminaient parfois en dînant avec les joueurs. Une époque révolue.

Lors d'un débat organisé début février par l'Institut pratique du journalisme (IPJ) sur l'évolution du métier de journaliste sportif, Arnaud Lecomte, spécialiste du basket à L'Equipe et président de la section francilienne de l'Union des journalistes sportifs français, donnait son explication: «Ces derniers années, il y a eu une inflation des médias, des chaînes de sport, et, logiquement, du nombre de journalistes.» Parallèlement, certains champions sont devenus de véritables stars nationales, voire planétaires. Voyant leurs joueurs trop sollicités, les clubs ont fermé les portes et les vestiaires. «Il n'est plus possible d'approcher les joueurs, confirme Arnaud Ramsay, ancien patron des sports de France Soir. Quand on arrive à les interroger, ils manquent de spontanéité. Surtout, ils voient les journalistes comme des ennemis. A force de vouloir cacher les choses, les joueurs et les clubs s'enferment dans une sorte de parano».

Des pratiques propres à la France

Une rupture de communication entre les journalistes sportifs et le football français est patente. «Cette tendance à la surprotection est un vrai risque de fracture, qui se fera au détriment de l'information, reconnaît François Pesenti, directeur général de RMC Sport. Quand les clubs se ferment, on se tournent vers les agents, voire la famille des joueurs. Au final, les clubs ne contrôlent plus rien du tout». «En verrouillant leurs informations, ces derniers font un mauvais calcul car le pouvoir est passé dans les mains des agents, estime Karim Nedjari, rédacteur en chef de Canal+. Pour obtenir une information sur un joueur, l'agent nous demande parfois d'en passer une autre sur un joueur moins connu, mais qu'il veut mettre en avant».

Ces pratiques seraient propres à la France. Dans les ligues professionnelles américaines, les règles sont très différentes. «L'objectif de la NBA est d'obtenir la plus large couverture médias possible au basket pour développer son business, indique Arnaud Lecomte, reporter à L'Equipe. Les joueurs sont disponibles jusqu'à une demi-heure avant le coup d'envoi, et les vestiaires accessibles quinze minutes seulement après la fin du match, Toutes les stars sont là, sans contrainte.» Le rêve américain pour des journalistes sportifs français frustrés.

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