L'année des médias 2011
Au-delà du succès cinématographique, le long métrage sert-il la cause de l’insertion des personnes handicapées? Éléments de réponse.

Plus de dix millions de spectateurs en quatre semaines! Le film Intouchables d'Éric Nakache et Olivier Toledano, vient d'entrer dans le Top 10 des meilleures quatrièmes semaines depuis 1945, selon le classement CBO Box Office. Bien sûr, il faudra attendre la fin de son exploitation en salle, pour connaître son rang définitif au panthéon des films français. Les militants en faveur de l'insertion des personnes handicapées dans l'entreprise en attendent beaucoup: qu'il devienne un film-phénomène, celui qui a tordu le coup aux clichés sur le handicap! «En faisant évoluer l'image de la personne handicapée, inactive, cloîtrée chez elle», espère Louis Von Proosdij, entrepreneur, à la tête de Fairplay Interactive, une société de six salariés, et tétraplégique. C'est déjà en bonne voie. «Nous n'avons pas encore de retour des salariés, mais c'est une sensibilisation indirecte et massive, souligne Véronique Ghisleri, responsable de la mission Handicap de Lagardère Active. Un événement comme celui-là peut avoir un impact plus important sur les mentalités qu'une session de formation en entreprise.»

 

Un point de vue partagé par François Atger, directeur de la communication de l'Association pour la gestion, la formation et l'insertion des personnes handicapées (Agefiph): «Le film est loin d'avoir fait le plein de spectateurs, et il est trop tôt pour mesurer les bénéfices par rapport à l'intégration des personnes handicapées. Mais l'intérêt et l'engouement autour d'Intouchables sont des indicateurs très positifs. Pour moi cette approche décomplexée mais respectueuse de la personne handicapée s'inscrit sans la continuité des publicités que nous avons tournées avec Jamel Debbouze en 2009. Des sketchs visionnés plusieurs millions de fois.»


Même si tous insistent sur le fait que le succès de cette comédie tient à ce que ce le handicap n'est pas le sujet central: «Un film sur le handicap cela embêterait tout le monde», pointe Louis von Proosdij. Selon François Atger, Intouchables doit aussi sa belle carrière, à Facebook, Twitter et consorts: «Avant la sortie, il y avait un buzz positif très important sur les réseaux sociaux, au point qu'on peut se demander s'ils n'ont pas plus d'impact que les colonnes Morris.»


Les réseaux sociaux sont en tout cas déterminants dans le regard porté sur les handicapés. Six mois plus tôt, ils ont même fait office de bonne fée pour Louis von Proosdij, entrepreneur, tétraplégique, très connu dans l'univers des start-up: «Alors que depuis plus de vingt ans, une personne venait m'aider à prendre une douche tous les matins, Santé Service, l'organisme qui s'occupe de moi, a décidé début juin que je n'aurai plus qu'une douche par semaine, remplacée par une toilette au lit quotidienne.»

 

Double peine: l'organisme décrète également que Louis von Proosdij n'est plus prioritaire dans les tournées de l'auxiliaire de vie, qu'il peut être amené à attendre jusqu'à 10 heures du matin. «À partir de là, tout s'est effondré, relate-t-il, au bout de sept jours, j'avais les cheveux gras et je ne pouvais pas imaginer aller travailler, et rencontrer des clients dans cet état.» Louis von Proosdij décide de partager son désarroi sur son blog, un soir à 22h. Ses amis qui ont entre 10 et 100 000 «followers» sur Twitter, s'en emparent: «En deux heures ça a explosé, j'ai reçu plusieurs centaines d'alertes par minute sur mon Iphone.» Surtout, dès le lendemain matin, 8h, trois cabinets de ministres l'appelaient, et le directeur de Santé Services le contactait dans la foulée. Depuis septembre, Louis von Proosdij, peut prendre une douche tous les jours et retravailler normalement...

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