Ressources humaines
Michel Gotlib, directeur communication marketing de Coca-Cola France et intervenant à Sciences Po et à l'ESCP Europe, revient sur les attentes des jeunes et les enseignements qui leur sont dispensés.

En quoi la nouvelle génération arrivant sur le marché du travail vous paraît-elle différente des précédentes ?

Michel Gotlib. Ils me semblent avoir un esprit d'entreprise déjà très développé et une capacité à prendre des risques que n'avaient pas les générations précédentes. Ils n'ont pas peur de proposer des idées et d'innover. Ils ont également un rapport au temps très différent et sont dans la culture de la vitesse. Cela signifie qu'à une question posée, ils attendent une réponse quasi immédiate, claire, directe et sans langue de bois. Ils ont aussi une culture de la recherche de l'information et du partage en réseau très importante.


Cette volonté de raccourcir et de clarifier les processus se retrouve-t-elle dans le rapport à leur carrière?

M.G. Tout à fait. Ils ont une grande soif de mobilité, aussi bien en interne qu'à l'international. Sur ce point, ils me paraissent beaucoup plus ouverts sur le monde que les générations précédentes. Ils ont envie de bouger, et vite. Ils n'ont pas peur de le faire savoir. Ce sont des pragmatiques. S'ils ont le sentiment que leur employeur rompt le contrat de base qui les lie, faire leurs valises ne leur posera aucun problème.

 

En quoi font-ils évoluer l'entreprise ?

M.G. Leurs exigences poussent les entreprises à être toujours plus réactives et à remettre en cause leur modèle. Cela passe notamment par une adaptation du management, qui doit miser sur la proximité et la transparence. Il faut aussi leur proposer des parcours de carrière individualisés, des possibilités de formation toujours renouvelées. Chez nous, les moins de trente ans représentent environ 40% des effectifs et nous travaillons beaucoup sur ces axes. C'est d'autant plus important pour nous que ces jeunes collaborateurs sont en phase avec nos cibles et modes de communication.

 

Quels sont les défauts majeurs de cette génération?

M.G. Ils ont surtout les défauts de leurs qualités, à savoir le fait de parfois confondre vitesse et précipitation. Compte tenu de l'accélération de la mobilité liée à cette volonté d'apprendre, ils sont souvent impatients et ne prennent pas assez de temps pour acquérir une véritable expertise dans une fonction donnée. Ils semblent moins intéressés que la génération précédente par l'avis d'experts et la transmission de l'expérience par leurs aînés. Ils privilégient le transfert d'information au travers des outils technologiques et du partage en réseau.

 

Parallèlement à votre activité de directeur communication marketing de Coca-Cola France, vous intervenez pour donner des cours à des étudiants en fin de cycle. Comment considérez-vous leur niveau face aux attentes de l'entreprise?

M.G. Il y a souvent un décalage important. La plupart du temps, ce qu'on leur a enseigné durant leurs études est déjà périmé une fois en poste. Mais comment le reprocher au corps enseignant? L'évolution des métiers du marketing et la manière d'engager des relations avec le public évolue de manière tellement rapide que certains ouvrages de marketing et de communication sur lesquels ils travaillent n'ont forcément pas eu le temps d'intégrer ces changements. Mais, de fait, au moment de leur entrée dans l'entreprise, ces jeunes ne parlent pas toujours notre langage. Ils insistent encore souvent sur l'importance des «5 P» du mix marketing (price, product, promotion, place, people), alors que ces concepts ont laissé la place à des approches très différentes aujourd'hui.

 

Comment limiter ce décalage entre la théorie et la pratique?

M.G. Ce que font les écoles de communication et de marketing via les partenariats noués avec les entreprises me paraît très bien. Cela peut prendre différentes formes: des chaires sur des sujets spécifiques montées avec des entreprises, des rencontres avec des recruteurs, ou encore la forte présence d'intervenants professionnels dans le corps pédagogique, et bien entendu des facilités de stages pour les étudiants. Apprendre à apprendre, s'ouvrir sur l'international et renforcer les échanges avec le monde réel de l'entreprise me semblent être les trois clés du succès pour l'avenir.

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