Les déclarations récentes de Vincent Peillon sur le cannabis et la tragi-comédie qui en a découlé ont permis de rappeler combien la communication politique est un art subtil. Les tribuns parlementaires ne sont pas nécessairement les plus habiles. Les plus préparés pêchent par fausse naïveté et la moindre sortie de route hors «éléments de langage» conduit au bord du précipice.
Les bons mots succèdent aux néologismes. On est au spectacle, les ventes de marinières explosent, les bons points succèdent aux secs rappels à l'ordre et d'aucuns se moquent de celui qui, pendant quelques secondes, a oublié sa condition d'homme public et la responsabilité qui est la sienne. A chaque gouvernement ses ego, ses francs-tireurs et ses conceptions solitaires du pouvoir. On glose, on interprète, on oscille entre jubilation et désespoir au café du commerce. A qui la faute ? Aux communicants ? Aux politiques ? Aux journalistes ? Aux Français ? Tous coupables, tous responsables, et au final tous complices d'une communication réduite à une succession de saynètes dérisoires.
Il y a des sujets bien plus importants que la communication politique, certes, et il y a toujours des exceptions à la règle. Il faut d'autant plus l'admettre que la communication gouvernementale est par essence déceptive. Aujourd'hui, en mélangeant informations, promesses, ballons d'essais, émotions et engagements, elle clive, elle se dénature, elle appelle aux commentaires de forme et non aux analyses de fond. La communication semble formatée pour faire gagner des places dans les indices de popularité. Mais dans le contexte actuel, où chaque mot compte et engage la parole du président de la République, où le moindre fait divers revêt les oripeaux d'une affaire d'Etat, elle doit se réinventer.
Pour un gouvernement qui doit affronter les conséquences sociales et économiques d'une crise d'une rare violence, la communication politique a désormais atteint un point de non retour. Soit elle se régénère avec des fondamentaux solides et elle permettra de redonner des lettres de noblesse aux valeurs fondamentales de la République et à l'engagement de nos représentants, soit elle continuera à osciller entre transparence supposée et information téléguidée, et apportera son lot de désillusions et de raccourcis.
Cassons les codes et encourageons ceux qui poursuivent leur exigence de vérité et de rigueur. Oublions la compétition made in Twitter. Imaginons des cénacles et des formats neufs et modernes, compatibles avec les exigences de « l'infotainment ». Réinventons les conférences de presse autour d'un exercice moins calibré et plus interactif. Raréfions certaines prises de parole. La surcommunication a peut-être broyé l'information, mais la créativité et l'audace n'ont jamais tué. Les moutons, eux, survivent rarement longtemps loin du berger.