En 2007, les tout premiers travaux du collectif Adwiser pointaient le retard du secteur de la communication dans l'intégration des enjeux du développement durable. Le constat tombait, sévère : les communicants étaient les derniers à se mettre en mouvement pour diminuer l'empreinte environnementale de leur activité et, plus largement, à formaliser les contours d'une démarche sectorielle de responsabilité sociale et environnementale.
Avec le Grenelle de l'environnement, les publicitaires furent dénoncés comme des irresponsables par nombre d'ONG et d'associations (au mieux nous jugeait-on inconscients et, au pire, parfaitement cyniques): la communication était stigmatisée comme le bras armé d'un consumérisme dévastateur que l'accélération des crises sanitaires, environnementales, sociales, financières rendaient toujours plus insupportable. La publiphobie, bien française, allait bon train.
Les débats réglementaires et le tunnel médiatique 2007-2010 ont fait le reste. Du pacte écologique de Nicolas Hulot (à la veille de l'élection présidentielle de 2007) à l'échec de la conférence de Copenhague sur le climat en passant par le premier (et très court) ministère du Développement durable du quinquennat Sarkozy, le Grenelle de l'environnement, l'annonce en fanfare et le retrait au clairon de la taxe carbone, une nouvelle culture (conscience?) s'est forgée.
La démultiplication des messages (le plus souvent alarmistes et anxiogènes), mais aussi et surtout l'utilisation abusive de l'argument environnemental (le fameux «greenwashing») ont accéléré la perte de confiance dans le discours environnemental des entreprises et la sincérité des émetteurs, qu'ils soient publics ou privés.
Et à présent: la crise. Une crise économique et sociale qui interroge nos modes de consommation (fallait-il subventionner la consommation de carburant en cette fin d'été?), mais surtout une crise de confiance sur la capacité de notre société à se réinventer. Dans ce contexte, comment parler des sujets environnementaux, des efforts entrepris par les entreprises et les organisations sans craindre une suspicion légitime de nos publics? Comment calmer l'animosité d'ONG fatiguées de surprendre encore certaines marques utilisant les vieilles ficelles du maquillage et de l'omission pour se faire une vertu socio-environnementale? Bref, le développement durable est-il un sujet comme un autre?
Ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain. Le secteur de la communication a fait un bond spectaculaire en cinq ans. Les organisations professionnelles se sont emparées du sujet et l'autorégulation mise en place avec le Grenelle a fait ses preuves.Tout système est perfectible, et la suspicion de certaines associations est compréhensible (peut-on faire confiance aux professionnels pour arbitrer les usages internes dans leur métier?).
Le développement durable dans le secteur de la communication et de la publicité est un sujet infiniment culturel. La prise en compte de notre responsabilité sociétale interroge notre sacro-sainte liberté d'expression, de création et de provocation. Que la publicité façonne une époque est une évidence. Elle participe, comme les médias, l'art ou l'éducation, à notre imaginaire collectif. Elle promeut des usages, stigmatise des comportements, hypertrophie des valeurs…
Mais elle est une formidable courroie de transmission qui accélère la distribution des biens et des services et, par-là même, permet l'activité humaine, ses échanges et son développement.
Nous sommes à un moment formidable où se télescopent tous les enjeux – économiques, sociaux, culturels, politiques voire spirituels – et se conçoivent toutes les solutions pour notre avenir collectif. La communication, par sa capacité à conceptualiser, embarquer, faire partager sera, à n'en pas douter, au cœur de cette réinvention. La communication dite responsable est le signe de notre envie puissante d'y contribuer.