Pour fêter ses cent premiers jours passés à l'Élysée, le président de la République a été gâté: les sondages se sont donné le mot pour lui offrir des chiffres de popularité en chute sensible. Et même, pour certains d'entre eux, un passage sous la barre symbolique des 50% d'opinions favorables. Ainsi, dans le baromètre CSA/Les Échos, paru le 23 août, seuls 49% des sondés accordent leur confiance à François Hollande. Soit 5 points de moins qu'en juillet (-17 parmi les plus jeunes et les plus âgés) et 9 de moins qu'en mai.
Un constat modéré par le sondage Ifop/JDD du 27 août, où les Français sont encore 54% à exprimer leur satisfaction. On voit bien ici l'influence de la formulation des questions sur les réponses, selon que l'on demande aux sondés s'ils ont «confiance» en François Hollande pour affronter efficacement les problèmes du pays (CSA) ou bien s'ils sont «satisfaits» de lui en tant que président de la République (Ifop).
Pas d'état de grâce face à l'état de la Grèce
Malgré cette nuance, l'enquête de l'Ifop montre également une chute de popularité pour Hollande: -7 points depuis son premier mois de mandat, et -16 chez les employés pour le seul mois d'août. Un décrochage plus précoce que son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, qui n'avait dévissé dans les sondages qu'à la fin de l'année 2007 (pour atteindre un niveau historiquement bas en février 2008). Mais la crise internationale est passée par là.
Face à ce «contexte économique assombri», «les électeurs “ne se font pas d'illusion”», explique Yves-Marie Cann, directeur d'études chez CSA. Mais il souligne que la baisse de popularité du président «peut aussi être due à un problème de communication, d'affichage», en lien avec sa «volonté de se démarquer absolument de Sarkozy». Il ne suffit plus d'afficher une présidence «normale». Car à force d'avancer à un rythme de réformes raisonné, privilégiant l'humilité et la concertation, François Hollande se heurte à «l'impatience» des Français.
Un sentiment partagé outre-Rhin, notamment par le Süddeutsche Zeitung de Munich: «Ce style de présidence tranquille fait du bien au pays – fini l'agressivité et l'agitation des années Sarkozy. Pourtant, un jour ou l'autre, il ne suffira plus de jouer les anti-Sarkozy, Hollande devra dire ce qu'il veut.»
Bientôt le «moment de vérité»
En attendant, seuls 24% des Français interrogés par CSA considèrent que le gouvernement est suffisamment actif, un chiffre qui ne monte qu'à 51% parmi les sympathisants socialistes. Ce «signal d'alerte», selon Yves-Marie Cann, montre qu'il y a «urgence à travailler sur plus de visibilité et de lisibilité, afin d'afficher la mobilisation de l'exécutif».
François Hollande devrait connaître son «moment de vérité fin septembre», explique le directeur du département opinion et stratégies d'entreprise de l'Ifop, Jérôme Fourquet (lire aussi encadré). À ce moment-là, le gouvernement devra faire des annonces sur la fiscalité, les députés voteront le budget de la sécurité sociale, les différentes commissions lancées durant l'été rendront leurs conclusions... Autant d'écueils à éviter, sans parler des plans sociaux qui menacent d'assombrir un tableau déjà morose. «Il ne pourra pas se défiler», relève Jérôme Fourquet.
Le sondeur laisse tout de même un espoir au président: «S'il échoue, cela n'inspirera pas un sentiment de trahison aux Français, comme ce fut le cas avec Sarkozy, car il n'a promis que ce qu'il pouvait tenir.»
Avis d'expert :
Jérôme Fourquet, directeur du département opinion et stratégies d'entreprise de l'Ifop
«Les Français n'ont pas encore tranché. Soit ils attendent que des jalons soient posés, soit ils s'interrogent sur la capacité de François Hollande à arbitrer. En règle générale, l'opinion se cristallise à l'automne, à partir d'éléments déjà présents pendant l'été. Mais pour l'instant, la douloureuse n'est pas encore tombée. La France se trouve dans l'état d'un patient en salle d'attente d'un médecin, ne sachant pas trop quel sera son traitement mais se doutant que la potion sera amère.»