69% des Français soutiennent le mouvement social contre la réforme des retraites.

«Le début de la fin?» À la veille du vote définitif par le Parlement du texte réformant les retraites, nombre de médias s'interrogeaient sur l'essoufflement du mouvement social lancé le 7 septembre. De fait, mardi 26 octobre, la grève a été arrêtée dans trois raffineries, les éboueurs marseillais ont repris le travail, les lycéens sont en vacances et le trafic ferroviaire est redevenu quasi normal. De là à penser que la journée de mobilisation du jeudi 28 octobre sera le baroud d'honneur de ces deux mois de contestation… Le gouvernement veut le croire.

Mais, sur le fond, il lui reste à régler un problème de taille: le fossé qui semble s'être creusé avec l'opinion. Car selon une étude menée du 20 au 21 octobre pour La Matinale de Canal+ par l'institut BVA, le soutien aux grèves et manifestations ne faiblissait pas en pleine pénurie d'essence et alors que les débordements des casseurs faisaient la une des journaux.

Reposant exactement les mêmes questions que celles que l'institut Viavoice avait posées pour Libération les 14 et 15 octobre derniers, BVA a pu constater que le soutien global au mouvement social est toujours massif (69%). Il a même progressé de 2 points en une semaine.

Les seniors très partagés

Les grèves dans les transports en commun sont ainsi soutenues par 52% des Français, contre 45% qui les désapprouvent. Le blocage des raffineries en revanche est plutôt désapprouvé (52% contre 46%), mais moins qu'une semaine auparavant (54% contre 42%). La mobilisation des élèves et des étudiants, quant à elle, divise les sondés: 48% approuvent, 50% désapprouvent.

À noter qu'au-delà du traditionnel clivage gauche-droite, une opposition générationnelle se fait jour sur ces différents sujets. Les actifs (25-64 ans) sont très majoritairement favorables au mouvement social dans toutes ses dimensions: 74% de soutien au mouvement, 58% aux grèves dans les transports, 53% au mouvement étudiant et même 52% au blocage des raffineries.

S'ils soutiennent très largement le mouvement social (73%), les 15-25 ans sont en revanche très partagés sur la mobilisation de leurs «congénères» (47% approuvent, 48% désapprouvent), comme sur la grève dans les transports (48% contre 45%) et sont majoritairement hostiles au blocage des raffineries (43% contre 51%).

Enfin les seniors, âgés de plus de 65 ans, sont très partagés sur le soutien global au mouvement social (49% contre 50%) et hostiles dans toutes ses dimensions: 62% désapprouvent la mobilisation des étudiants comme les grèves dans les transports et 65% le blocage des raffineries.

Mais face à une mobilisation et à une opposition aussi marquées de la part de la population active du pays («ceux qui se lèvent tôt»), le gouvernement va devoir être particulièrement inspiré pour redorer son image. Un simple travail de pédagogie serait non seulement bien tardif mais aussi sans doute insuffisant pour faire bouger les lignes en matière d'opinion. Cela permettrait a minima de conforter la position du gouvernement auprès de l'électorat de droite.

Reste à savoir si un remaniement gouvernemental, un virage «plus social» et une exposition internationale accrue du président suffiront à combler ce fossé d'ici à 2012. 

 

Parole d'expert

 

Céline Bracq, directrice adjointe de BVA Opinion

 

«Les Français sont favorables au principe d'une réforme des retraites, mais pas à celle du gouvernement et notamment du passage à 62 ans et surtout à 67 ans. Les Français attribuent finalement la responsabilité des blocages et des dérapages à Nicolas Sarkozy plus qu'aux manifestants. En fait, il s'agit d'un désaccord profond avec la politique économique et le bilan général de Sarkozy, basé sur un sentiment d'injustice, une notion qui ressort beaucoup de nos études. C'est un défi à relever par le gouvernement, d'autant que l'opposition la plus résolue à sa réforme se trouve parmi la population active du pays.» 

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