« Redonner envie d'aimer la publicité. » La feuille de route que s’est fixée en début d'année le nouveau président de la délégation publicité de l'AACC résume à elle seule la détresse dans laquelle se trouve tout un pan d'une profession. Car qui « aime » encore vraiment la publicité aujourd'hui, à part les publicitaires eux-mêmes ?
Côté consommateur, la réponse est plutôt claire. La croissance du recours aux adblockers, les mouvements antipub, la hausse record des abonnements aux plateformes d'information et de divertissement sans publicité ou encore les propositions de la Convention citoyenne pour le climat illustrent clairement le niveau de défiance du grand public envers la publicité. Plus spécifiquement de la part des plus jeunes, qui la tiennent notamment pour responsable des dérives consuméristes passées et de leurs impacts.
Une fin en soi
Les années Culture Pub sont bel et bien enterrées. La pub n'est plus un objet culturel pour les nouvelles générations. Nombre d'agences se trompent de combat en se complaisant à entretenir ce « modèle culturel » auprès de leurs clients et de leurs équipes, considérant bien trop souvent leur discipline comme une fin en soi. Oui, la publicité est probablement faite pour faire adhérer, pour transformer les attitudes et les comportements, mais elle ne vit pas pour elle-même ! Pour se réinventer et aider les marques à affronter le « monde d’après », nos métiers méritent mieux que de s’auto-considérer.
Pour se renouveler, repartir à la conquête de ses publics et de son efficacité, la publicité a besoin avant tout de laisser derrière elle une partie de son ADN et de ce qui cause en grande partie son rejet d’aujourd’hui. La publicité traditionnelle s'est en effet développée, au siècle dernier, en répondant à une logique de marketing de masse : des produits de masse standardisés, distribués largement, et que l’on promouvait grâce aux médias de masse, le tout reposant sur le postulat que le marché était constitué d’une masse homogène.
Les publicitaires se sont alors mis à la recherche de l’insight consommateur unique, de la « unique selling proposition » pour s’adresser à cette « masse homogène ». Il est clair qu’on ne peut plus considérer cette approche de masse comme référente en 2020 si l’on cherche à éviter la défiance des personnes que l’on vise. Chacun a ses raisons de croire et ses raisons d'acheter. On ne peut plus considérer les consommateurs comme un ensemble uniforme.
Alors qu’une surexposition est devenue aujourd'hui inefficace et même contre-productive, on ne peut plus leur répéter toujours le même message et la même raison d’acheter. Il faut désormais capitaliser sur l’innovation technologique et l’exploitation de la data. Les possibilités de ciblage et de personnalisation sont déjà immenses pour éviter le « banner burn out ».
Image individuelle
S'ouvre l’ère de l’ « atomic advertising », qui consiste à diffuser, enchaîner et répéter des messages de manière unique à chacune et chacun, construisant ainsi une image individuelle de chaque marque, chaque proposition de valeur ou offre. C'est l’occasion de présenter des messages et arguments propres à convaincre les individus, contrairement à une approche de masse. Le sujet n’est plus la répétition des messages, mais bien au contraire la répétition des contacts avec des messages différents.
Il est donc temps de passer à cette nouvelle ère où l’on considère la pluralité des individus, de leurs freins et motivations, où l’on envisage les possibilités de ciblage et d’adaptation au contexte, et où l’on distribue des messages en conséquence. Une nouvelle ère où l’on prend en compte les formats digitaux, la digitalisation des médias traditionnels, et la réalité média de la diffusion des messages.