Tribune
De la même manière que les marques, les hommes politiques sont régulièrement attaqués sur les réseaux sociaux. Mais à la différence des annonceurs, le dégagisme en politique est davantage définitif.

Comme les marques, les hommes politiques sont adorés un jour et cloués au pilori le lendemain, régulièrement attaqués et malmenés par la rumeur médiatique. En effet, l’homme politique est aujourd’hui aussi vite disqualifié qu’une marque commerciale, à la différence qu’il ne dispose plus, lui, de la possibilité de reconquérir ses publics et redorer son blason. Le temps des carrières politiques avec des hauts et des bas, des scandales et des retours en grâce, est bel et bien révolu. Le dégagisme en politique est plus cruel et plus définitif que dans l’univers des marques. Sans doute parce que les attentes ou les espoirs formés vis-à-vis des hommes politiques sont aussi plus importants.

Plusieurs raisons peuvent expliquer ce changement brutal. En premier lieu, la mutation des médias : vitesse et sensationnalisme engendrent une spirale déformante de l’information, propice au traitement erroné et superficiel des sujets. En second lieu, l’hypermédiatisation des hommes politiques et la personnalisation de leur image, qui met une pression continue sur ceux-ci et relègue au second plan les idées comme l’argumentation. Si les marques peuvent encore se racheter avec le temps, l’homme politique n’a plus de possibilité de retour après une « traversée du désert ». S’il veut revenir dans l’arène, persuadé qu’une nouvelle crise a chassé la précédente, son passé lui sera vite rappelé car les réseaux sociaux sont hypermnésiques : la moindre déclaration ou le moindre commentaire fait il y a quelques années peut être ressorti subrepticement.

Diffusion rapide et incontrôlable

Les médias sociaux, les plus difficiles à maîtriser car le contenu y est co-produit, sont devenus la clé de voûte de l’information en temps réel et leur impact est déterminant sur la perception immédiate du grand public. La sur-information rend les citoyens plus alertes et surtout hyperactifs, révolutionnaires de salon faisant acte militant au travers d’un tweet ou d’un retweet. Les différentes possibilités de partage de l’information engendrent une diffusion rapide et incontrôlable de celle-ci, avec souvent beaucoup de confusion, d’approximations voire d’informations trompeuses. On ne compte plus les hommes politiques de premier plan disqualifiés à tout jamais, à tort ou à raison, par ce type de mécanique, de François de Rugy à Jean-Paul Delevoye aujourd’hui.

A l’heure des nouveaux médias et de la recherche permanente de responsables, le personnel politique concentre plus que jamais les critiques et reproches de toutes sortes. Il est la victime expiatoire de tous les ressentiments. Et la gestion de crise est devenue la norme de la communication politique : plus le temps de construire son image dans la durée, il faut tout le temps et tout suite parer au plus pressé. Le droit à l’erreur n’est plus possible dans le monde digital.

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