Tribune
Twitter, Instagram, Facebook, Twitch, YouTube, Snapchat, TikTok… On ne compte plus les plateformes où les influenceurs partagent chaque jour leur train de vie, leurs habitudes de consommation, les marques qu’ils apprécient... Certains diront que l’accès à cette vie privée n’est que le sommet de l'iceberg.

Comme tout marché ou métier - influenceur est un métier quoiqu’on en dise -, il existe dans le monde du marketing d'influence des rouages méconnus, parfois sombres. Se pose alors une question récurrente : quelle est la place de l’éthique dans ce modèle ? Les gouvernements de pays comme le Canada, les États-Unis et la France ont décidé d’en faire un véritable sujet, avec la mise en application de la loi sur la concurrence et la loi sur la protection du consommateur. Ces dernières obligent désormais les influenceurs à préciser sur leurs publications quand il est question d’un partenariat rémunéré, soit à l’aide d’un hashtag #ad, #sponsored, ou d’une bannière «partenariat rémunéré», mise en place par Instagram. Une contrainte non négligeable quand on sait que 86% des consommateurs français affirment avoir déjà effectué un achat en cliquant sur le lien proposé par un influenceur, selon Rakuten Marketing.

Par ailleurs, au sein de certains grands groupes médias, les journalistes se doivent de signer une charte appelée «manifeste». Ce document explique ce à quoi le ou la journaliste peut prétendre en termes de dotation, limitant les cadeaux, les voyages de presse et autres moyens de collusion, dans l’intérêt de protéger l’intégrité de sa parole. Une certaine façon de conserver une éthique, avec en jeu - c'est là que le journaliste et l’influenceur se rejoignent - celui de diffuser l’information. Néanmoins, avec les réseaux sociaux, il n’est pas question de ce type de charte ou même de cadre. Les influenceurs sont les seuls aux commandes, avec leur conscience et leur appétit du gain pour certains. Plusieurs influenceurs ont déjà été épinglés à ce sujet. La Youtubeuse Pretty Pastel Please a aussi récemment publié une vidéo révélant la pratique de marques et d'agences d’influence qui paient des influenceurs en échange d’un mauvais retour d’expérience sur une marque concurrente.

Recherche d’authenticité

C’est dans ce contexte qu'Instagram a décidé récemment de mettre en place cette nouvelle politique du «like caché» en masquant le nombre de j’aime sur une photo. Vrai problème mais fausse solution. En effet, le fait de bloquer le compteur ne sera en rien un moyen de mettre fin au harcèlement ou à la pression sociale que subissent les influenceurs. Mais c'est un très bon moyen pour Instagram de gagner un peu plus d’argent avec l’obligation pour ses acteurs de payer pour être vus. D’autant plus que l’influenceur, lui, pourra voir le nombre de likes et s’empressera de partager cette information avec son public (agences comprises) en story.

Une chose peut se réaliser grâce à cette nouvelle politique menée par Instagram : la recherche d’authenticité et d’exclusivité. Les agences et les marques voudront moins de collaborations et de photos sur Instagram de leurs produits, mais plus de qualité. L'influenceur serait enfin libre de faire et publier ce qu’il désire. Les envois en masse et non ciblés cesseront, une certaine redistribution des cartes s'opèrerait alors afin de partir sur des bases saines. A moins que se poursuivent les collaborations actuelles basées sur du copinage et de beaux Powerpoint pour montrer son influence aux agences et aux marques, sans grand impact pour ce milieu opaque.

En partant de ce constat, peut-on vraiment espérer davantage d'éthique chez les influenceurs et les acteurs qui l’entourent (agences de publicité, RP, CM, marques) ? Si l’on en croit les mouvements de conscience récents comme le boom du bio, la décroissance et la fin du système capitaliste, l’éthique chez certains aura toujours sa place. Le hashtag #ecofriendly comptabilise à ce jour plus de 1,7 million de publications sur Instagram, rejoignant ainsi l’incontournable #makeourplanetgrateagain, influé par le président Emmanuel Macron. La communication et les réseaux sociaux feront donc de l’éthique une norme chez chaque acteur de ce domaine, laissant de côté celles et ceux qui ne jouent pas le jeu ou ne s’impliquent pas. Reste aux marques d’oser. Et aux agences, d’éduquer leurs clients. Car oui, l’éthique devient à ce jour un facteur de croissance pour les entreprises qu’il n’est plus bon de mettre de côté.

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