Tribune
Prédire le futur du retail implique de comprendre comment la technologie va radicalement transformer la façon dont les consommateurs réalisent leurs achats. Demain, les courses et le shopping seront vécus comme deux activités très différentes, pour le plus grand bien de quelques-uns et le malheur du plus grand nombre.

C’est à travers l’usage de la technologie que fera le consommateur que se construira, pour partie, l’avenir de la distribution et des marques. Mais le consommateur se moque bien de la technologie à partir du moment où elle lui permet de réaliser ses objectifs. Les algorithmes à l’œuvre derrière le mot valise d’intelligence artificielle (IA) réalisent déjà le travail de recommandation, que ce soit via les haut-parleurs intelligents de type Amazon Echo ou un moteur de recherche intégré quand nous souhaitons un jean ou des piles. Il s’agit du début d’une évolution qui verra d’ici quelques années la séparation de l’activité contingente des achats de commodités - les courses - de celle du shopping, plus impliquante au niveau social et personnel.

Demain, les algorithmes réaliseront les achats de routine et ne nous demanderont notre implication que pour leur signaler des facteurs exogènes modifiant nos types ou nos niveaux de consommation. « Alexa, n’oublie pas que 3 copains viennent au BBQ ce week-end, qu’on soit sûrs de ne pas manquer de bière ! » Mais Alexa ayant l’œil sur notre agenda et nos moyens de communication l’aura déjà prévu. Tout cela a déjà commencé, sous nos yeux.

Voyez le service Amazon Prime Wardrobe aux Etats-Unis, qui teste, depuis début 2018, l’achat suite à l’essayage. Vous commandez tout ce que vous souhaitez puis renvoyez ce que vous ne gardez pas. Voyez le rachat de Whole Foods par Amazon en 2017, qui lui permet d’être proche de sa clientèle cible, les abonnés Prime, et ainsi gérer le dernier kilomètre, aller et retour, notamment pour l’épicerie puis le frais.

Automatisation des achats de commodités

Plus de 90% de nos achats de produits de grande consommation sont des achats de commodités, ce qui pèse sur notre quotidien. Amazon - et d’autres - nous libéreront de cette tâche fastidieuse en nous livrant ce dont nous avons habituellement besoin, via des box navettes que nous utiliserons pour retourner ce que nous n’avons pas utilité. Alexa nous recommandera des produits Amazon, tout comme elle le fait depuis deux ans aux Etats-Unis. Cette automatisation de nos achats de commodités provoquera un bouleversement dans les modes de distribution et signera également la mort de bien des marques de produits de grande consommation si elles ne réussissent pas à sortir du champ mortifère des commodités.

Enfin libéré du poids des courses, le consommateur pourra faire du shopping pour les produits et les services qui l’aident à exprimer qui il est. Le consommateur sera alors en quête d’expérience et de sens. Les marques devront maîtriser de bout en bout l’expérience client pour communiquer et démontrer la réalité de leurs valeurs sociétales et éthiques afin de répondre à cette quête de sens de leurs clients. Selon une enquête menée en janvier 2019, 62% des consommateurs français considèrent que l’éthique est un facteur clé quand ils effectuent des choix de consommation. 78% des consommateurs français estiment aussi que leur appréciation d’une marque dépend autant de son comportement que des produits ou services qu’elle vend.

Marques plus verticales

Si elles ne veulent pas être reléguées dans les commodités ou disparaître à la marge, les marques doivent ainsi devenir plus verticales, à l’exemple des digital native brands (DNVB), ces marques nées du digital, qui mettent en place des relations directes fortes avec leurs consommateurs. Comme Steve Jobs l’a prouvé avec Apple, l’expérience que le client connaît avec une marque passe par une expérience physique, notamment via la boutique, l’Apple Store. C’est pourquoi les expériences physiques et la maîtrise de leur distribution vont bientôt remplacer la publicité traditionnelle pour les marques.

Cela aura bien sûr des conséquences importantes pour l’écosystème publicitaire, qu’il soit digital ou non. Cela aura bien sûr un impact profond pour le retail. Procter & Gamble, Unilever…, l’ensemble des marques vont ou vont aller vers ce contrôle de l’expérience client via une relation directe, individualisée, omnicanale grâce à la technologie, mais également expériencielle, avec des magasins physiques et des équipes de haut niveau.

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