Le monde a changé. Notre pratique médiatique aussi. Il n’est plus possible de rapporter l’actualité sans prendre en compte les idées et les témoignages des lecteurs. L’info descendante, voire condescendante, réalisée par une caste de « sachants » et adressée à un public d’ignorants, c’est fini. Le peuple a pris le pouvoir avec la révolution numérique. Celle-ci lui a donné les outils pour participer. C’est l’ère du selfie. Pourquoi lui aussi ne serait-il pas sur la photo ?
Les médias sont en train de faire leur mue pour répondre à cette logique sociétale plus horizontale. Du modèle « broadcast », ils ont dû passer à un fonctionnement en réseau avec les audiences, capable de coconstruire leurs contenus avec elles. Le numérique nous offre une formidable opportunité : entrer en relation directe avec nos publics et les inciter à participer à la vie du média.
Journalisme augmenté
Les réseaux sociaux, les groupes privés, les messageries instantanées, les bots, les enceintes connectées, l’IA… tout cela a fait naître un journalisme augmenté. Plus participatif. Plus horizontal. Plus vivant. Et nécessairement plus vigilant. La vérification, la hiérarchisation et la curation de l’information sont et doivent rester la base du métier de journaliste. Il n’y aura jamais 65 millions de journalistes. Pour autant, quand un média tel que le nôtre touche plus d’un Français sur trois, il y a forcément des gens dont le point de vue, l’expérience ou l’expertise peuvent apporter un éclairage pertinent.
Avec vous
Au-delà des outils technologiques, le numérique est une culture qui repose sur des mécanismes collaboratifs et participatifs. Chez 20 Minutes, la rédaction – composée de plus de 100 journalistes – a depuis longtemps pris en compte cette nouvelle donne. La spécificité de 20 Minutes : le journal informe honnêtement, il ne donne pas de leçons à ses lecteurs, ne leur dit pas comment penser. Au contraire, il leur donne la parole, les écoute, les implique. Il tient compte de qu’ils disent. Il est avec eux. Il est l’un d’entre eux. #MoiJeune est un exemple concret de la capacité d’un média à dialoguer avec son audience. C’est une communauté de près de 6 000 jeunes âgés de 18 à 30 ans avec laquelle nos journalistes échangent pour trouver, valider ou ajuster des choix de sujets. Outre le fait d’engager fortement la communauté avec un taux de réponse moyen de 50 %, ces conférences de rédaction virtuelles offrent aux journalistes une matière complémentaire pour être au plus près du réel. Et ce qui résulte de ces échanges est passionnant. Les contenus produits s’enrichissent considérablement avec la coconstruction, les échanges et les conversations avec les lecteurs, au-delà des appels à témoignage et des réactions aux articles.
Cela doit bien sûr se faire sans naïveté. Les réseaux sociaux où se sont multipliés complotistes, haters et autres trolls facilitent à outrance les comportements inciviques (en réalité très minoritaires, même si très visibles) et la diffusion de fausses informations. C’est là encore que nous devons remplir notre mission. Notre rubrique « Fake Off » a elle aussi une dimension participative. Les lecteurs s’impliquent et contribuent directement en alertant la rédaction sur des rumeurs, des hoax et des fake news qui se propagent.
Mass media et communautés
Nous avons la chance de fédérer une très large audience (22,1 millions de lecteurs par mois sur l’ensemble des supports), essentiellement des jeunes actifs urbains, très connectés et enclins aux nouveaux usages sociaux. Nous sommes aussi un créateur et un agitateur d’une multitude de communautés. Des communautés qui nous permettent de faire remonter des idées d’articles, des réactions, de mesurer la pertinence d’un sujet, des questionnements, de compléter l’information. En parallèle de ces communautés cibles ou expertes sur des thématiques précises (livres, séries, féminisme, santé…), la technologie, avec l’IA et les bots notamment, nous offre la possibilité de multiplier ces initiatives éditoriales à plus grande échelle. Elle nous pousse à inventer, encore, de nouvelles écritures conversationnelles. Et à passer définitivement du récit au dialogue. Les grands mass media, en réduisant leur public à des cibles, en ignorant les personnes qui les constituent, en les tenant à distance, ont fini par créer une défiance entre citoyens et journalistes. Le numérique, parce qu’il permet le participatif à grande échelle, procure l’opportunité de revenir aux sources du journalisme, la conversation d’égal à égal, et ainsi de recréer la confiance.