Drôle de titre pour une tribune ! Mais ce rendez-vous mensuel dans Stratégies m’invite, avant d’aller plus loin, à me présenter. Président de Sidièse, j’aime dire, à l’envi, que notre petit monde de la communication a découvert le sujet du développement durable comme une poule qui trouve un couteau. C’est vrai que nous ne sommes pas venus à nos métiers par volonté philanthropique ou humaniste mais plutôt par goût de la belle histoire, de la création, de la relation humaine et d’une certaine vision du monde : iconoclaste, décalée, impertinente… chacun la sienne.
Nous sommes nombreux à être sincèrement convaincus que nous délivrons conseils et réalisations à forte valeur ajoutée qui contribuent réellement à la bonne marche des entreprises et des organisations que nous servons – voire à des grandes causes que nous soutenons.
Nous nous défendons d’être ce que nos parents, conjoints, copains sont encore nombreux à penser : des grands enfants qui, hors des contingences du monde et des « vrais métiers », jouent – en se prenant très au sérieux – à inventer de « belles histoires », tourner des films rigolos et siroter des coupes dans des cocktails.
Les communicants rattrapés par l’Histoire
Si cette perception nous colle à la peau, ce n’est pas tout à fait par hasard. Nous avons hérité d’une culture d’insouciance, née des Trente Glorieuses, de la publicité reine, des grandes messes de la télévision… Nous avons cultivé et revendiqué une liberté de création face au moralisme ambiant et aux nombreux censeurs. Mais nous avons été rattrapés par l’Histoire. À l’heure où le modèle consumériste est (de plus en plus) remis en cause, nous nous retrouvons associés à un système qui, disons-le clairement, a failli. La société de consommation à laquelle nous apportons, chaque jour, nos talents, dans sa recherche constante de rationalisation et de profits, a généré des impacts sociaux et environnementaux qui, aujourd’hui, nous sautent collectivement au nez : délocalisation, casse sociale, dégradation environnementale, climat, malbouffe, suremballage, gaspillage… j’en passe.
Et nous voilà, nous, tiraillés entre passion et fidélité à nos métiers et l’envie de prendre nos jambes à nos cous. Nos rythmes de travail sont devenus dingues par la pression des marchés, de nos patrons, de nos clients, la concurrence débridée, la démultiplication des canaux, la disruption à tous les étages. Répondre à nos potes qui nous titillent sur le sens de notre métier et sa/notre sincérité est devenu de plus en plus difficile. Car dans notre société où la suspicion n’épargne personne, les communicants sont considérés comme des manipulateurs patentés qui vendent du rêve (au mieux) ou de fieffés menteurs qui masquent la réalité du monde. Nous nous sommes habitués à l’expression « c’est de la com » qui définit assez bien notre pré carré aux yeux d’une immense majorité de nos concitoyens : la com c’est du vent !
Aller au-delà du confort matériel
Pourtant, nous savons combien nos métiers abondent d’expertise, d’intelligence, d’acuité. Tous ces talents sont disponibles, mobilisables au service de nouveaux modèles ou produits émergents, aux nouveaux usages et comportements nécessaires à la transition écologique et aux transformations sociales attendues par notre société. Nous sommes, effectivement, en première ligne pour répondre aux attentes pressantes des citoyens et des acteurs économiques. Face aux peurs et aux conservatismes, à une société toujours plus morcelée, aux écosystèmes dégradés, la communication doit prendre toute sa responsabilité. Elle doit véhiculer des représentations positives, faire envie, servir les marques et les institutions qui transforment la privation en conquête – elles existent –, raconter un nouveau confort, incluant notre confort intérieur, moral, émotionnel, un confort plus total que le confort matériel comme nous l’avons largement promu jusqu’ici.
Faire envie d’un nouveau confort, bien plus grand : mission impossible ? Je nous réserve quelques beaux exemples à partager ici.