Tribune
Face au scandale, les communicants se doivent de privilégier sincérité et humilité, quitte à prendre leurs responsabilités si la marque pour laquelle ils travaillent ne réagit pas à la hauteur de l'événement.

L’étymologie du mot scandale renvoie aux ecclésiastes et désigne une affaire de mœurs qui fait chuter une personne contrevenant à la morale. Aujourd’hui, lorsqu'une entreprise ou une personnalité se trouve pris dans un scandale, des communicants entrent généralement en scène. Reste à comprendre leur rôle: sont-ils des aiguillons du scandale ou, au contraire, des objecteurs de conscience? Prenons trois exemples. En 2015, Volkswagen est accusé d’avoir installé un logiciel pour truquer les tests d’émission de ses véhicules. 8,5 millions de véhicules sont rappelés en Europe. Le PDG de l’époque parle de « manipulation » et présente ses excuses mais ne démissionne pas. Logiquement, la communication fait un flop: pas de cohérence entre la gravité des faits et ses conséquences. C’est ce qu’on appelle la dissonance cognitive. Le scandale exige une prise de risque, celui d’initier, de nommer et d’accompagner une transformation profonde, quitte à tâtonner.

Les réseaux sociaux s'enflamment

Deuxième exemple en 2016 avec Samsung, qui connait un rappel de 2,5 millions de téléphones Galaxy Note 7 dont les batteries prennent feu. Pour les communicants, l’histoire avait mal commencé: des milliers de consommateurs ont posté sur les réseaux sociaux des batteries en feu. Le mal est fait. Samsung achète plusieurs pages dans les plus grands quotidiens de la planète, présentant des « sincères excuses » et assurant avoir déjà pris « des mesures correctrices ». Ici, les communicants « réparateurs » ont raison de reconnaitre l’ampleur du scandale mais le font d’autant plus volontiers que la marque a amorcé la refonte organisationnelle requise. Depuis, dans toutes les campagnes de l’entreprise, la notion de sécurité est mise au même plan que le design.

Troisième scandale: La Redoute. En 2012, un homme dans son plus simple appareil s’invite sur une page d’un catalogue de la marque. Les internautes croient au canular. C'est en fait une erreur de validation des images. La marque s’affole et retire le visuel tout en reconnaissant une « erreur ». Surtout, les communicants convertissent le scandale en opportunité: les clients sont invités, via un jeu inédit, à repérer les autres erreurs qui pourraient figurer dans le catalogue. Un coup de maître ! Certes, d’aucuns diront que le scandale n’était pas trop sulfureux, encore que. Pour une marque grand public, les lignes de respectabilité franchies sont souvent coûteuses. Ici, les communicants créatifs ont donné au scandale une seconde vie, en reconnaissant leurs limites de manière ludique.

Sincérité et humilité

Courroies de transmission, réparateurs, créatifs... Les communicants peuvent prendre plusieurs rôles pendant le scandale, selon la gravité des faits. Une idée simple reste efficace: sincérité et humilité. L’ère des dircoms ventriloques ou qui répètent à qui-mieux-mieux les mots des dirigeants a vécu. Le dircom clair-voyant, c’est celui qui sait si sa marque prend des décisions à la hauteur du scandale et qui prend ses responsabilités. Si la marque n’a pas de considération pour le traitement opérationnel du scandale, quittez votre job et trouvez des espaces où votre métier ne consistera pas à faire accepter l’inacceptable. Communiquer, c’est rendre l’information « commune », lisible par tous, à l’instar de l’étymologie du mot. Pour créer du commun, il faut se fonder sur la véracité des données en présence, en faisant acte de datadéontologie. Ainsi, les communicants doivent traduire les faits de manière « augmentée », avec empathie, au moment opportun, sans dénaturer le sens, et être lucides sur leur impuissance si les dirigeants de l’entreprise ne tirent pas les conséquences du scandale. Soyez audacieux et éthique. Car comme disait Bossuet, « Dieu se rit des créatures qui maudissent les effets dont elles chérissent les causes. »

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