La laideur se vend mal certes, mais le design n’est pas là que pour faire joli ! Il est centré sur l’humain, il invente, solutionne, facilite l’usage et les interactions entre les hommes dans la vie réelle. C’est un état d’esprit : le design rapproche en effaçant les contraintes. Prenez les « pianos SNCF » : la mesure des émotions en gare d’Aix-en-Provence a prouvé qu’ils amélioraient considérablement l’expérience… et le temps d’attente devient alors du temps utile. C’est un design sonore, anti-stress qui rapproche les gens, mais surtout qui résout la problématique du pic de stress du voyageur ! Un disque est même sorti d’une rencontre inattendue entre deux inconnus dans un aéroport. De nombreuses marques semblent l’avoir compris (mais aussi les villes qui deviennent par ailleurs aussi des marques), la proximité s’impose comme un nouveau modèle de développement : s’inscrire durablement dans l’engagement citoyen, créer de la fidélité, du lien. Alors quelle meilleure solution que le design pour façonner cette proximité, pour créer un impact positif, repenser, réinventer les usages de notre environnement immédiat ?
Utopie réaliste
Le bien commun entre dans nos usages et redonne du sens à nos actions : il se transforme en quête. La « Journée internationale du vivre ensemble » vient d’être créée par l’ONU (avec le premier baromètre de la fraternité), et la première halle civique ouvre à Belleville. L’Observatoire des marques positives prouve que la « positivité » est un facteur multiplicateur des intentions d’achat. Après les marques éthiques en « A », Columbia, Lafuma et Patagonia en tête de file, dont 1% des revenus est redistribué à des associations de défense de l’environnement, arrivent les marques prônant le bien commun et l’utilité. En un mot, les marques qui vont durer sont celles qui vont jouer un rôle dans les grandes étapes de nos vies : de l’apprentissage à la création pertinente, de la découverte au partage. Et oui, selon Salesforce, 66% des clients sont prêts à changer de marque s’ils se sentent considérés comme un numéro.
Les mains dans le faire et ancrées dans la vraie vie (locale)
Marque et entreprise se doivent d’être citoyennes, engagées dans la vie sociale et au service de leur territoire. À Berlin, Zalando expérimente la mise en commun de ses stocks avec des boutiques partenaires, laissant ainsi la possibilité à ses clients de récupérer leurs achats chez un commerçant plutôt que d’être livré. C’est bon pour la planète, c’est bon pour le commerce local. Le monde est global et pourtant composé d’une multitude de territoires ayant une identité propre. Michel Lussault parle d’hyper-lieux : des espaces comme des territoires intenses où les usages s’inventent et se mixent. Pas besoin d’aller très loin, venez à Saint Ouen, « ville du faire où tout reste à faire ». Nous venons d’y lancer la campagne « Inspire ta ville », des affiches inspirantes et inspirées des lieux emblématiques de la ville, pour donner un autre regard collectif sur cette ville en pleine mutation. Elle part d’une envie, d’une initiative privée de graphistes mercenaires (sans commande). JC Decaux et l’imprimerie locale SB nous ont rejoint dans l’aventure au nom du bien commun. 2 000 affiches ont été distribuées chez les commerçants, dans les institutions et les immeubles, par les enfants de Saint-Ouen encadrés par des étudiants et des bénévoles des associations de la ville. Les affiches remplacent les publicités pendant quelques semaines, oui tout est possible pour le bien commun ! Alors n’oublions pas d’avoir des rêves.
Créateur de valeur
Peut-être avez-vous vu fleurir à Paris, Londres ou Bruxelles des bancs verts capables de filtrer autant de CO2 que 275 arbres ? Ou des roues de voiture qui absorbent la pollution ? L’impact est double : protéger la planète et participer au bien-être des citadins. Cela est vrai dans d’autres secteurs : too Good to Go lutte contre le gaspillage alimentaire en sauvant près de 5000 repas par jour et connaît une croissance annuelle de 1600% sur un modèle économique win-win !
Les grandes avancées sont souvent considérées comme de doux projets rêveurs avant de devenir réalité. C’est l’utopie réaliste, le concept de Rutger Bregman. Œuvrer pour le bien commun et avoir une activité viable économiquement n’est plus de l’ordre de l’utopie, c’est nécessaire et c’est un merveilleux levier pour les designers et les marques qui rend leur rôle dans la société encore plus essentiel.
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