Le Brexit, sans aucun doute, est ressenti comme la fin du monde pour certains d'entre vous, et je le comprends. Mais d'un point de vue européen - par exemple, mon bureau ici à Paris - ce nuage gris britannique pourrait contenir une lueur d'espoir. La Grande-Bretagne, avec comme chef de file Londres, a toujours été un foyer de talents créatifs dans la publicité et dans des domaines connexes comme le design, la production et le numérique. Mais dorénavant, elle va peut-être devoir se battre plus fort pour avoir sa part du vivier de talents.
En fait, après le Brexit le bonus involontaire pour l'Europe, va probablement être un afflux de talents créatifs. Sur une petite échelle, j'en vois déjà la preuve. Au cours des deux derniers mois, j'ai reçu plus de CV en provenance du Royaume-Uni que dans les trois dernières années. A plus grande échelle, ce n'est peut-être pas un hasard que Facebook ait choisi Paris plutôt que Londres en investissant 250 millions d'euros dans son nouvel 'incubateur de start-up'.
Une migration est déjà en cours dans le secteur financier, bien sûr. HSBC voudrait transférer environ mille emplois à Paris; Goldman Sachs a déclaré qu'il augmenterait son personnel existant à Paris et à Francfort. Il est intéressant de noter que l'assureur Lloyds de Londres dit qu'il va ouvrir un bureau supplémentaire à Bruxelles pour s'assurer de ne pas passer à coté des opportunités européennes. Peut-être que le scénario post-Brexit le plus adapté pour Adland est un marché du travail élargi: Londres sera toujours Londres, mais de nouveaux pôles centrés sur l'Europe vont apparaître.
Où seront-ils? Paris, comme je l'ai déjà mentionné, serait susceptible de vivre une renaissance créative. Amsterdam a été longtemps sur les talons créatifs de Londres, de sorte que nous pouvons nous attendre à ce que de plus en plus de talents partent là-bas aussi.
Un des plus grands gagnants sera l'Allemagne. Mes amis n'ont pas tardé à suggérer que Londres soit sur le point d'être usurpée du titre de la ville la plus attrayante de la région pour les innovateurs. Le lendemain du vote pour le Brexit, une agence de Berlin a fait circuler un véhicule publicitaire mobile autour de Londres avec un message pour les jeunes entrepreneurs: "Chères start-up, restez calme et installez-vous à Berlin".
Quiconque est allé à Berlin récemment sait que cette cité respire la créativité. Certes, les gros clients manquent mais l'Allemagne a toujours été décentralisée et interconnectée. Dans l'ensemble, le pays a une bonne combinaison d'opportunités, d'infrastructures et d'agences existantes. Berlin ajoute de la fraicheur et de la magie. Et créativement parlant, si vous regardez les résultats de Cannes, l'Allemagne pèse de tout son poids. Si j'étais un jeune talent créatif, j'y prêterais attention.
A propos, selon le classement des meilleurs pays récemment publié par Y & R BAV Consulting et de l'École Wharton de l'Université de Pennsylvanie, la Suisse est considérée comme le meilleur endroit pour accueillir le siège d'une organisation. Alors que les grandes entreprises se sentent à l'aise, cela est bien trop coûteux pour les agences, de sorte que la publicité des géants suisses a tendance à être traitée par les pays voisins. Comme l'Allemagne.
Revenons un instant à Bruxelles. Selon The Guardian, Lloyd's of London a choisi cette ville parmi d'autres choix comme le Luxembourg, Dublin et Malte, entre autres. Bruxelles a un patrimoine créatif solide, le numérique y est fort et c'est littéralement la porte d'entrée vers l'Europe. Je viens juste de me rappeler que Gray a acheté l'agence belge Famous en juillet dernier et j'ai donc sorti cette citation du communiqué de presse: «Compte tenu du récent référendum sur le Brexit, il est impératif que nous cherchions activement à accélérer notre expansion sur les marchés clés de l'UE. Bruxelles est au cœur de l'UE et il est maintenant essentiel que nous ayons une forte présence d'agence dans cette ville ".
Je n'aurais pu mieux le dire moi-même. En tant qu'agences publicitaires, notre capacité à influencer la culture dépend de notre compréhension de cette culture. La Grande Bretagne tourne le dos à l'Europe, il est raisonnable de penser que les clients chercheront des agences qui sont en phase avec un marché de 500 millions de personnes. Plus de travail veux dire plus d'embauches, ainsi les CV des personnes créatives pourraient s'envoler dans le ciel comme une nuée d'oiseaux et se rabattre vers l'Europe.
Ce n'est pas forcément une mauvaise nouvelle pour la Grande-Bretagne. Dans le Financial Times, Paul Marshall, président du fonds d'investissement Marshall Wace et de la Prosperity UK Brexit Conference, a suggéré qu'après avoir été contenues par la réglementation de l'Union Européenne, des industries comme «la biotechnologie, l'agro-industrie, les ports, l'énergie et le Fintech» auraient toutes "l'opportunité d'innover et de se développer d'une manière qui n'était pas auparavant possible". D'autres avantages potentiels seraient de nouveaux accords commerciaux avec les États-Unis, l'Australasie, l'Inde et la Chine, et un nouvel accent mis sur le perfectionnement de l'économie du savoir britannique.
De nombreux talents créatifs en herbe rêvent d'un travail à Londres et il semblerait que cela ne risque pas de changer. Mais je suis convaincu qu'après le Brexit, la Grande-Bretagne ne pourra plus se reposer sur ses lauriers et attendre que les demandes affluent. Elle devra plaider son cas en faisant son autopromotion elle-même non comme la capitale créative de l'Europe mais en tant que centre mondial de vision et d'ingéniosité à part entière. Heureusement, cela s'apparente à un travail pour des publicitaires.
Si j'ai bien lu les signes, une guerre pour les talents créatifs vient de commencer. Et les combattants sont la Grande-Bretagne et l'Europe.