Je suis profondément sidéré par le nombre d’entreprises qui investissent dans des technologies DMP sans s’être posées au préalable des questions pourtant structurantes :
- Quels sont mes objectifs à court, moyen et long terme ?
- La DMP répond-t-elle à ces objectifs ?
- Quelle est ma vision cible et quelle est ma road map ?
- Quels sont les KPI’s à suivre ?
- Comment faire évoluer mon organisation pour exploiter de manière optimale ma DMP ?
Certaines marques de renom acquièrent ainsi une solution technologique et se posent ensuite la question de l’usage voire de la finalité. Certains projets s’enlisent, d’autres sont purement et simplement mis entre parenthèses. Les attentes sont énormes, voire irrationnelles, et les déceptions souvent au rendez-vous. Nous risquons de fait de revivre avec les DMP ce que nous avons vécu dans les années 90 avec le CRM : des projets sans suite, des logiciels dans le placard (ou plutôt dans le brouillard du cloud), des équipes démotivées et des sommes colossales dépensées inutilement. Surtout, les directions générales vont jeter le bébé avec l’eau du bain et le data marketing, pourtant efficace et plein de promesses, va être associé à ce gâchis pour plusieurs années.
La mise en place d’une DMP est un projet structurant. Elle doit prendre en compte l’ensemble des tenants et aboutissants et intégrer toutes les parties prenantes de l’entreprise : communication, achat média, marketing, CRM, le réseau et bien sûr la DSI.
La tendance de fond qui se dessine montre que la finalité de la DMP n’est pas uniquement d’optimiser l’achat média. C’est un projet Data Marketing de fond qui doit permettre de driver l’ensemble de l’expérience client et donc l’ensemble de l’activité marketing de l’entreprise. Dans ce sens, de plus en plus de projets DMP deviennent en définitive des projets MDM (Master Data Management) rendant possible une vision 360° du client et des interactions personnalisées sur l’ensemble des points de contact. Le média devient un canal parmi d’autres et la DMP Media stricto sensu le composant d’un écosystème data-marketing plus vaste.
Il y a en définitive trois étapes essentielles dans un projet Data Marketing :
- la réflexion amont
- le build
- le run
L’étape de réflexion est trop souvent négligée et réduite à une expression de besoin strictement fonctionnelle. La mise en place d’une DMP ou d’un MDM peut ouvrir de nouveaux possibles dans la manière de gérer la relation avec les différents contacts de la marque (suspects, prospects, clients, etc.). En amont d’un projet, il est essentiel de croiser les différents objectifs de l’entreprise et d’avoir une vision claire sur l’attendu de la solution data marketing à court, moyen et long termes.
Tout comme l’étape de réflexion, le run est trop souvent « oublié » dans l’élaboration de ces projets. Qui doit gérer le data marketing en interne ? Quels process mettre en place ? Quels profils recruter ? Avec quel type de prestataire travailler ? Les projets data marketing déçoivent souvent pour des raisons organisationnelles et notamment par manque de préparation des équipes chargées d’exploiter ces nouvelles solutions.
L’exploitation du data marketing nécessite des compétences marketing ET technologiques qu’il est souvent difficile de trouver au sein des organisations «classiques» chez l’annonceur ou à l’agence. Il faut en effet que l’organisation intègre à la fois la capacité de comprendre les objectifs business ET les contraintes et possibles technologiques. Elle doit ensuite être à même de concevoir des customer journeys (UX et expertises marketing relationnel), de créer les supports qui seront diffusés (création et web design), de paramétrer et d’activer les outils de management de campagnes (expertises Adobe, Bluekai, Salesforce, Ysance, etc.), de créer les tableaux de bord permettant de suivre les principaux KPI’s (expertises en analytics et en infoviz), d’interpréter ces résultats et d’être force de proposition pour optimiser les scénarii et/ou les ciblage et/ou les créations.
C’est un cercle vertueux. Une faille dans ce cercle et c’est toute la machine qui déraille. L’approximation n’est plus de mise et si la créativité reste essentielle, elle doit être encadrée et "processée" pour intégrer ces nouveaux outils. Le marketing s’automatise et s’industrialise. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce n’est pas un obstacle à la créativité, au contraire ! Il faut en revanche réussir le challenge de faire travailler ensemble des profils qui n’ont pas l’habitude de coopérer. C’est LE défi de la communication et du marketing de demain.
Pour que les projets data marketing réussissent, pour que l’on ne jette pas la DMP ou le MDM à la poubelle, il faut réussir cette alchimie contre-intuitive : associer dans un même dessein la technologie et la créativité, le process et l’agilité, le rationnel et l’intuitif. Il faut mixer les cultures, briser les silos et savoir garder cet équilibre subtil entre ces deux univers que tout sépare aujourd’hui mais dont l’intégration est inéluctable !
Comment éviter que la DMP ne finisse à la poubelle ?
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