En novembre dernier, le célèbre magazine de mode et beauté américain Allure opérait un virage stratégique, offrant sur son site la possibilité d'acheter directement les produits repérés par la rédaction grâce à la technologie Master Pass de Master Card. Ce balbutiement a ouvert la voie à de nouvelles perspectives de monétisation pour les titres de presse cherchant à renforcer leurs liens avec les annonceurs et, évidemment, à diversifier leurs revenus. Une orientation logique: la confiance des lectrices et lecteurs dans la presse est un facteur qualitatif propice à l'engagement des clients pour une marque.
La technologie proposée par Master Card n'est cependant pas aboutie: la découverte de produits en ligne ne constitue pas une expérience complète, ne serait-ce que parce que sont oubliés les lecteurs fidèles, engagés, intemporels. C'est-à-dire ceux qui consomment leurs contenus sur un support papier, tant convoités par les annonceurs. De nouvelles synergies sont donc à explorer afin de réinventer la découverte contextualisée de produits. Un défi loin d'être impossible, auquel pourtant ni la publicité ni l'achat en ligne traditionnel ne peuvent et ne savent encore répondre.
Optimiser la distribution en réinventant l'expérience de lecture. Le mobile est devenu un point d'accès incontournable. Mais, en France, la pénétration du m-commerce est limitée: selon la Fevad [Fédération e-commerce et vente à distance], les ventes sur mobile ne représentent que 16% du chiffre d'affaires des principaux acteurs de l'e-commerce. Tous les ingrédients sont pourtant réunis pour qu'il s'envole, mais l'absence ou le manque d'évangélisation auprès d'une cible plus traditionnelle fait défaut. C'est un vrai paradoxe. D'un côté, plus d'un français sur deux dispose d'un smartphone. De l'autre, si les investissements dans la publicité en ligne continuent d'augmenter, ils ne sont pas au rendez-vous sur mobile. Il existe cependant des solutions permettant au marché d'orchestrer la transition et aux annonceurs de profiter le l'essor de l'usage des smartphones. Le tout sans forcer les éditeurs de presse à tirer un trait sur leur source de revenu principal: la publicité sur papier.
Une opportunité originale: le Shazam de la presse. La réinvention de l'expérience des lecteurs fidèles à la presse papier peut et doit passer par le mobile, d'une part parce que les français aiment découvrir de nouvelles technologies simplifiant leur quotidien, et d'autre part parce que le succès de Shazam dans la musique a prouvé que les technologies de reconnaissance visuelle, si elles sont bien pensées et simplifiées, sont bien placées pour connaître le même succès. La proposition d'acteurs comme Selectionnist est similaire. Elle contribue à dynamiser un marché prometteur sans pour autant inquiéter les acteurs traditionnels: c'est un contrat gagnant-gagnant dans lequel l'expérience client est au cœur du processus.
Le 20 mars dernier, Elle a sorti un numéro événementiel entièrement «flashable»: l'application a permis à toutes les lectrices de retrouver sans difficulté les produits présentés dans le magazine, facilitant l'acte d'achat mais également la curation. Les lectrices n'avaient qu'à photographier une page de leur journal pour retrouver les produits repérés: c'est la naissance d'un Pinterest «offline». Cette proposition de valeur permet aux annonceurs d'instaurer un nouveau dialogue avec les consommateurs. Ils ont pu pour la première fois obtenir des données en temps réel sur l'intérêt porté par leur marque lors d'une expérience de lecture sur papier. Pour les médias, c'est une manière de se réinventer, sans se sacrifier.