Le réseau social de Mark Zuckerberg tente de réagir. Tombé de son piédestal après l’affaire Cambridge Analytica, le géant a pu voir qu’il n’était pas intouchable, et chaque jour, porte une nouvelle riposte, pour se racheter une exemplarité. Le 24 avril, il a rendu publiques les conditions de modération sur la plateforme. Savant exercice d’en-même-temps-tisme concret, très à la mode depuis quelques mois. À chaque paragraphe, se mélangent fermeté face aux comportements inappropriés et indulgence pour garantir la liberté d’expression des utilisateurs (et éviter qu’ils n’aillent ailleurs). À y bien regarder, ce sont bel et bien les contours d’un lieu utopique que Facebook tente de construire depuis ses débuts. Un autre lieu, en dehors du réel, en dehors des frontières, où une communauté se parlent à coup d’amitié, de j’aime et d’émojis… Mais les utilisateurs ont aussi le droit de faire des phrases ! Dépassé par la liberté d’écrire de la communauté qu'elle a elle-même créée, voilà Facebook contraint d’« empêcher toute forme potentielle de danger réel », comme le définit la première partie des standards. Une périphrase savonneuse qui laisse les coudées franches au réseau pour déterminer réalité et irréalité comme il le souhaite. C’est tout le problème des utopies : inventées pour penser le réel, pas pour s’y confronter.