On a été habitué à reconnaître les poètes non pas parce qu'ils produisent des vers, mais parce qu'ils construisent un monde. C'est dur à admettre mais les poètes – les artistes en général – ne sont plus seuls dans cette visée: ils sont rejoints par les GAFA... Google, Apple, Facebook, Amazon. Un quatuor qu'on peut élargir à quelques autres, comme Microsoft ou Twitter. La différence, bien sûr, est de nature: ce que construisent les GAFA n'est pas ouvert mais circulaire, pas universel mais totalisant.
Certes, ces entreprises sont «cool». Elles sont présentes dans la vie des gens et elles rendent des services, c'est le soubassement de leur influence. Elles sont aussi à la pointe de l'innovation, c'est une autre de leurs caractéristiques. Innovation scientifique, technologique, marketing.
Mais ces multinationales défraient régulièrement la chronique – on apprend que Facebook a manipulé près de 700 000 utilisateurs de ses services en 2012 – et elles ont aujourd'hui un gros problème de réputation (ce qui les conduit à faire des concessions, à donner des gages). C'est, pardon pour cette mauvaise blague, une donnée.
La data! Tout vient en effet de cette fameuse data que les GAFA, telles les firmes du XIXe siècle avec le capital, accumulent mécaniquement, nécessairement. Tout en procède et tout y conduit.
Les citoyens s'en inquiètent et ne sont pas les seuls. Les marques, les agences et les médias sont aussi concernés au premier chef. Certains ont tapé du poing sur la table, à l'instar de Mathias Döpfner, patron d'Axel Springer, en avril dernier. La désintermédiation crée des ruptures dans la chaîne de valeur, change la circulation des flux, menace grandement bien des positions. D'aucuns pourraient s'en féliciter à court terme. Mais c'est peut être un calcul à courte vue.
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