Chronique
C’est reparti. Fort, bien sûr. 2018 ne nous donnera guère plus qu’un dernier petit trimestre désormais. Nous vivons donc dans cette courte période de l’année où le temps et les tendances se concentrent et où tout s’est éclairci au soleil d’août.

Facebook qui pleure, Instagram et WhatsApp qui rient

Au milieu de l’été, le cours de l’action Facebook a perdu 20% en une séance. Et c’était avant que le Pew Research Institute nous apprenne tout début septembre que 26% des personnes qu’il avait sondées avaient désinstallé l’application Facebook de leur smartphone. On peut moquer ou pleurer la chute de Facebook, elle est réelle. Mais elle cache la réussite hallucinante de ses autres services WhatsApp et Instagram. Je n’ai jamais connu un service comme Instagram qui ne rend pas seulement le monde plus accessible, mais qui le transforme, physiquement. Les restaurants, les hôtels, même les musées sont désormais pensés pour être “instagrammables”. Le pont façonne la rive. C’est une nouvelle étape du logiciel qui mange le monde, la bouche en duckface.

 

La guerre des trottoirs

Logiciel qui mange l’asphalte aussi avec le free floating. La débâcle Vélib avait permis à des services de vélos en libre-service (GobeeBike en premier) de tenter la stratégie du coucou : prendre la place de nos (ex) bons (déjà) vieux Vélib pensés comme du mobilier urbain et donc fixes. Les derniers arrivés après les vélos et les scooters du français Cityscoot et de l’allemand Coup sont apparus comme des champignons sur nos trottoirs cet été : des trottinettes électriques. Déjà trois opérateurs, en trois mois : Lime, Bird et Taxify. Mais cela ne durera pas. Il me semble inconcevable que nos trottoirs restent longtemps les pistes de ces engins rapides aux mains de débutants. Ailleurs, déjà, on souligne que c’est aux urgences qu’on mesure le plus l’impact du développement des scooters en libre service.

 

Amazon Eldorado

Deux entreprises ont dépassé les 1 000 milliards de dollars de capitalisation boursière cet été. Une première dans l’Histoire. Apple début août, Amazon à peine un mois plus tard mais, comparativement, 17 ans plus tôt.  50% du e-commerce aux États-Unis, avec un Américain sur trois abonné Prime, infrastructure du e-commerce mondial, leader du cloud qui lui apporte sa rentabilité – car elle gagne de l’argent et depuis onze trimestres consécutifs –, Amazon est donc la première « digital native platform » à atteindre ce sommet, celui qui domine l’économie mondiale. Les analystes estiment que sa valeur est au moins de 1 200 milliards. Amazon n’a donc pas seulement fini de dévorer le commerce et le monde, Amazon est devenu le commerce.



Tesla dans les virages

Nous nous étions quittés avec Elon Musk superstar. Depuis, il ne dort plus, enchaîne les déconvenues, fume des pétards en direct sur YouTube. Audiard a dit « quand les types de 130 kilos disent quelque chose, ceux de 60 kilos les écoutent », alors nous, moi, on la fermait mais Elon, ça fait un moment qu’on se dit qu’en voiture de sport ou en navette spatiale, il a lâché la rampe. Mais comme à chaque fois, c’est un peu triste de voir un super-héros devenir l’arbre qui cache la forêt, le bébé prodige qui va partir avec l’eau du bain. C’est dommage parce que Tesla était sur le point de démontrer que le logiciel avait aussi mangé l’industrie.



Fifa et la coupe du monde

La France championne du monde cet été 2018 ! Avec la sélection la plus jeune du tournoi. Certains joueurs – Pavard ? – inconnus au bataillon. Qui pouvait prédire la victoire ? Certainement pas la banque la plus puissante du monde, Goldman Sachs, qui s’est bien plantée en nous promettant l’Allemagne pas même sortie des poules. Non, ceux qui avaient tout bon, et ce pour la troisième coupe du monde d’affilée, c’est… Electronic Arts, l’éditeur du monumental jeu vidéo Fifa. L’éditeur a prédit tous les concurrents, Argentine, Uruguay et Belgique, et toutes les victoires de la France, des poules jusqu’à la finale, se trompant sur ce dernier match en voyant l’Allemagne à la place de la Croatie. Fascinant. Qui copiera l’autre entre physique et numérique ? Où sera le vrai suspens ? Les algorithmes vont en tout cas avoir un impact bien plus important que le dopage sur le sport.



2018 n’est pas finie mais croyez-moi ou jouez à Fifa, c’est ce qu’on retiendra. On se fatigue à jouer aux bilans et aux prédictions en hiver mais c’est en septembre qu’on voit le plus clair dans ce grand estuaire poissonneux, celui où le numérique se jette dans le « physique », le front des opérations et de la transformation.



 



 

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