Cinq des candidats les mieux placés à l'élection présidentielle ont tous derrière eux un parti dont le nom date de moins de sept ans. En politique, comme ailleurs, la nouveauté séduit.
Il est frappant de constater que les cinq noms des partis des candidats les mieux placés à la prochaine élection présidentielle sont tous des noms nouveaux, datant de moins de sept ans. Emmanuel Macron : La République En Marche ! (2018), issu de En Marche ! (2016) ; Marine Le Pen : Rassemblement National (2018) ; Éric Zemmour : Reconquête ! (2021) ; Valérie Pécresse : Les Républicains (2015) ; Jean-Luc Mélenchon : La France Insoumise (2016).
Parmi ces cinq noms, trois sont vraiment nouveaux : La République En Marche (LREM), Reconquête et La France Insoumise (LFI). Deux noms sont proches d'anciens noms de partis : Rassemblement National et Les Républicains.
L’arrivée d’Éric Zemmour constitue la surprise de ces élections, comme il y a cinq ans celle d’Emmanuel Macron. Chacun d’eux a fondé un nouveau parti dont le nom se démarque des noms existants. Les noms LFI, LREM et Reconquête ont l’intérêt de s’affranchir du vocabulaire politique classique. Ces trois noms, dynamiques, positifs, s’associent à un imaginaire large.
Exclamations
En Marche ! suggère un départ, un groupe soudé, une balade, la nature, l’oxygène… Le point d’exclamation ajoute une note enthousiaste et sûre de soi. Les initiales EM sont aussi celles d’Emmanuel Macron et la syllabe « Ma » est commune, ce sont des plus. Le passage de EM à LREM représente un pas en arrière : on retrouve le vocable politique classique, on ne s’évade plus. Relativisons néanmoins : la sympathie spontanée générée par EM s’atrophie mais le candidat est devenu président, ce changement de nom, regrettable aujourd'hui, n’a probablement qu’une importance limitée en 2018.
La France Insoumise suggère une personnalité rebelle, qui résiste, une posture courageuse, héroïque. Se soumettre n’est pas une notion positive, valorisée dans notre inconscient collectif, alors que l’insoumission suscite souvent le respect. Le démarrage, « La France », donne de l’envergure, on ne parle plus d’une tendance politique.
Enfin, Reconquête ! évoque un élan, de l’enthousiasme, une réussite. Il y a eu une perte mais elle n’est pas définitive, on peut rebattre les cartes. Et toujours ce point d’exclamation dynamisant. Là encore, on ne se cantonne pas au politique, on ouvre le champ. Une reconquête peut concerner un amour perdu, la forme, la jeunesse, le respect de ses proches…
Autre fait notable de ces élections : la percée de Valérie Pécresse. La candidate avait marqué les esprits en lançant en 2017 le mouvement Libres ! Ce nom fort, très remarqué des politiques et du public, lui avait permis de créer l’événement et de préempter l’image d’une femme de caractère, authentique, audacieuse.
Les noms RN et LR ont peu d’intérêt mais ils suggèrent quand même que les deux partis ont au moins cherché à évoluer. Notons qu’il est plus difficile d’être audacieux quand on renomme un parti existant que quand on en nomme un nouveau.
En sixième position dans les sondages, Yannick Jadot, candidat d'Europe Écologie-Les Verts (EELV), aurait dû occuper une meilleure place compte-tenu de la forte percée des préoccupations écologiques. On peut penser qu’il est desservi par le nom de son parti : un sigle qui date de 2010 et qui peut sembler âgé aujourd’hui. EELV se voit ravir la nouveauté et la vedette par les cinq partis concurrents précités.
Scores modestes attendus pour le PS et pour le PCF. Ces deux partis ont conservé un nom ancien, ce qui laisse penser qu’ils peinent à évoluer.
Au final, l’épisode covid a créé un fort besoin de changement et a accéléré le vieillissement de nombreux noms. On savait depuis des années que les noms des partis avaient vieilli mais le renouvellement se faisait attendre. En 2022, le changement est effectif et les nouveaux noms de partis marquent des points alors même que rien ne change vraiment. En politique, comme ailleurs, la nouveauté séduit et c’est bien ce qu’on observe aujourd’hui à travers les scores des candidats dans les sondages.