Le géant Google fait face à plusieurs procès phénoménaux, intentés par le ministère de la Justice aux États-Unis. En jeu : son possible démantèlement.

Il n’y a plus qu’à attendre. Lundi 25 novembre, le Département de Justice des États-Unis (DOJ) et Google jouaient leurs dernières cartes dans ce qui s’apparente, pour le monde de la pub en ligne, à l’affaire du siècle. Google est accusé de monopole sur le marché de l’open web, mais pas encore déclaré coupable. Sa maison mère, Alphabet, risque de devoir de séparer d’activités publicitaires… La juge Leonie Brinkema, qui a déclaré avoir assisté à l’affaire la mieux débattue de sa carrière, devrait rendre ses conclusions au premier trimestre 2025.

Ce procès ne doit pas être confondu avec un autre, intenté sur la recherche en ligne, pour lequel le juge fédéral Amit Mehta a reconnu l’activité monopolistique du géant en août 2024. Le DOJ a demandé entre autres, dans la sentence, à ce qu’il se sépare de son navigateur Chrome. Une décision très lourde de conséquences pour Google, qui a qualifié l’idée du DOJ de « stupéfiante ». Dans cette affaire, Google est accusé d’avoir mis en place d’énormes contrats avec certaines parties (Apple, les opérateurs de téléphonie…) pour s’assurer de l’utilisation de son service de recherche. Le géant pensait donc pouvoir s’en sortir en revoyant les clauses de ces accords. Mais la proposition du DOJ va beaucoup plus loin, et Google l’a qualifiée de « programme interventionniste radical qui nuirait aux Américains et au leadership technologique mondial de l’Amérique ». Le géant craint de devoir revoir ses investissements dans l’IA, ou encore de devoir augmenter le prix des téléphones mobiles. Autre argument avancé : « la sécurité et la confidentialité des Américains », affirmant que cela nuirait à la qualité des produits.

Cet argument sécuritaire revient aussi pour la publicité en ligne. Ces arguments ont été balayés par Aaron Teitelbaum, l’avocat du ministère, lundi 25 novembre : « De toute évidence, en tant qu’entreprise technologique, la cybersécurité est une préoccupation de Google, mais cela ne suffit pas », a-t-il avancé, arguant des termes utilisés par les employés eux-mêmes. Dans ces débats, le vocable adopté par les salariés est d’une importance capitale pour juger des intentions. Pour jeter le discrédit sur le géant, le ministère a ainsi avancé que les employés de Google devaient user dans leurs échanges de termes précis, ou ne parler librement que dans des discussions qui s’effaçaient automatiquement…

En matière de monopole, les débats sont d’une complexité extrême. Tout tient à la définition des marchés pris en compte pour qualifier le « trust ». Il peut se caractériser par des entreprises d’un secteur, ou par des produits plus ou moins substituables. Un micro-onde ou un four sont-ils concurrents au sein d’un foyer ? Ici, Google est pris au piège de sa propre pieuvre et du marché publicitaire. Présent partout, il a dû mal à être clair. L’accusé fait référence, dans sa défense, à TikTok, Amazon et Facebook, mais le DOJ ne voit pas en quoi ils sont des concurrents car ils n’œuvrent pas sur l’open web… Pour l’anecdote, le DOJ a reproché à Google de n’avoir cité qu’une seule personne parmi les témoins qui n’ait jamais reçu d’argent de sa part. Quoi qu’il en soit, l’accusé a prévu de faire appel dans les deux cas. Et si notre monde assiste un jour au démantèlement d’Alphabet, ce ne sera que dans plusieurs années.

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