Après le virage très à droite du JDD, le lancement cette semaine conjointement de La Tribune Dimanche et d’une nouvelle formule du Parisien Dimanche, relance la concurrence en ce jour particulier, stratégique pour un secteur en crise.

« On espère conquérir des gens qui ne se retrouvent plus dans l’offre du dimanche », déclare Jean-Christophe Tortora, président de La Tribune, à l’AFP. Vendu en version papier et numérique, La Tribune Dimanche est une déclinaison généraliste du quotidien économique en ligne, racheté par l’armateur CMA CGM du milliardaire Rodolphe Saadé. Elle mise sur « l’analyse, le décryptage », car « les Français ont plus de temps le dimanche » pour « des formats plus longs », selon M. Tortora, qui espère 30 000 ventes pour le premier numéro (sur un tirage de 120 000 exemplaires). Dirigé par Bruno Jeudy (ancien du JDD), ce nouveau titre sera le quatrième journal national du dimanche. Il s’est construit en sollicitant l’avis de lecteurs lors de rencontres dans des cafés partout en France.

Deux seront ses concurrents directs : le JDD (Journal du dimanche, dirigé depuis août par Geoffroy Lejeune, marqué à l’extrême droite) et Le Parisien/Aujourd’hui en France qui va proposer une version enrichie dès ce dimanche. Le dernier est le quotidien sportif L’Équipe. Nombre de quotidiens régionaux ont aussi une édition du dimanche. C’est d’ailleurs l’un d’eux, Ouest-France, qui a le plus gros tirage du pays ce jour-là, avec 398 000 exemplaires selon l’ACPM (Alliance pour les chiffres de la presse et des médias).

Lecteurs/électeurs

Cet été, le paysage de la presse dominicale a été secoué par un tremblement de terre avec l’arrivée de Geoffroy Lejeune au JDD. Beaucoup y ont vu la main du milliardaire ultra-conservateur Vincent Bolloré, dont le groupe Vivendi est en passe d’avaler Lagardère, propriétaire du journal. Après une grève de 40 jours, la quasi-totalité de la rédaction est partie et le JDD a adopté une ligne engagée à droite.

« Le choix assumé par le JDD, c’est d’être un journal d’opinion, commente Jean-Christophe Tortora. Nous, on traitera de la politique mais on n’est pas là pour en faire, on ne cherche pas des électeurs mais des lecteurs ». De quoi en déduire que La Tribune Dimanche veut refaire le JDD d’avant Geoffroy Lejeune ? Jean-Christophe Tortora s’en défend : « On a notre propre ADN ».

Chez Lagardère News, on assure qu'« il n’y a pas eu d’hémorragie » des ventes au nouveau JDD : « On est sur les mêmes ventes papier qu’entre janvier et juin, et à +13 % pour les abonnements numériques depuis août », affirme-t-on sans préciser ces chiffres. Selon l’ACPM, le JDD s’était vendu à 124 000 exemplaires (papier et numérique) chaque dimanche entre juillet 2022 et juin 2023.

Interviews politiques

Les grandes interviews politiques dominicales sont l’un des enjeux de cette recomposition. Elles étaient la marque de fabrique du JDD mais, depuis son repositionnement, aucun responsable de premier plan de la majorité présidentielle ne s’y est exprimé. Pour l’heure, Le Parisien/Aujourd’hui en France occupe ce créneau le dimanche. C’est là que la Première ministre Élisabeth Borne avait fait ses annonces sur les ventes d’essence à perte mi-septembre. « Ça fait plusieurs mois que les interviews politiques se passent au Parisien, ça ne date pas de cet été », nuance-t-on dans ce journal, qui va « enrichir » son édition du dimanche dès ce week-end. Elle va gagner huit pages, consacrées aux JO-2024 de Paris, à la culture ou aux loisirs. Le Parisien s’écoule à 160 000 exemplaires le dimanche, et Aujourd’hui en France, son jumeau vendu en province, à 60 000.

Côté presse régionale, les journaux du groupe Nice-Matin (Nice-Matin, Var Matin et Monaco Matin) viennent eux aussi de lancer une nouvelle formule dominicale. Là encore, l’accent est mis sur les sujets de société, l’art de vivre et les formats plus longs. « La consommation du journal le dimanche nous semble de plus en plus différente de celle de la semaine, qui est plus rapide », indique Denis Carreaux, directeur des rédactions du groupe, à l’AFP.

Face au flux continu des chaînes info et des réseaux sociaux, le septième jour serait-il pour la presse un moyen de surmonter la crise des ventes qui la frappe depuis plusieurs années ? « Notre constat, c’est qu’il y a peut-être une place plus importante pour la presse écrite le dimanche que les autres jours », avance Denis Carreaux.

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