Plateformes
Avec 17,4 % d'écoute en digital, la radio aborde une nouvelle phase de son développement. Les stations multiplient formats, performances tech et présence sur tous les supports, pour capter ces nouvelles audiences et conquérir de nouveaux territoires.

Selon les esprits déclinistes, la radio serait un média en recul. Elle a effectivement perdu 2 millions d'auditeurs quotidiens en un an, selon la dernière étude 126 000 de Médiamétrie, passant de 42 millions à 40 millions de 13 ans et plus au dernier pointage, en janvier-mars. Mais son aura numérique ne cesse de croître, comme le montre l'étude Global Radio. L'audience des podcasts en réécoute a progressé de 2,6 millions d'auditeurs sur un an. Et 8 millions de personnes écoutent désormais la radio sur des supports numériques chaque jour. Soit 15,1 % de la population, ce qui correspond à une augmentation de 400 000 personnes en un an.

Deux supports progressent. Le mobile d'abord, qui reste l'outil de prédilection avec 4,7 millions de personnes qui s'en servent pour écouter leur station soit 8,5 % de l'audience radio versus 8,1 % en 2020. Et les enceintes connectées, ensuite, utilisées par 1,1 million de personnes, soit 2 % de l'audience de la radio contre 1,5 % en 2020. Ces écoutes numériques touchent davantage les 25-49 ans : 19,8 % écoutent la radio ainsi, 23,1 % des CSP+ et 20,5 % des Franciliens. Le bassin numérique, en pleine croissance, est voué à poursuivre sur cette lignée.

Radioplayer, l'union qui fait la force 

Pas question donc pour les stations de laisser filer les digital natives sur les plateformes Deezer et autres Spotify. Les concurrents d'hier se sont unis pour proposer une appli commune baptisée Radioplayer et lancée il y a deux mois. Elle propose 220 radios, 600 webradios et 120 000 podcasts. Seul Skyrock y est resté sourd pour l'instant. Radioplayer compte déjà 120 000 téléchargements. « Notre réflexion commune a débuté il y a trois ans, explique Jean-Éric Valli, président de Radioplayer France. Nous nous sommes rendu compte que nous partagions le même diagnostic. Et qu'il était important que le monde de la radio crée une appli commune qu'il gère lui-même avec un regard tourné vers l'auditeur. L'enjeu est la présence dans les voitures, soit la signature d'accords avec les constructeurs auto pour être l'agrégateur choisi dans l'habitacle. C'est un combat qui se joue en coulisse et à guichet unique. » Une stratégie qui justifie le choix de la technologie Radioplayer, déjà présente dans quatorze pays d'Europe. L'appli va être améliorée et présente sur les enceintes connectées d'ici au deuxième semestre 2021.

Mais l'enjeu est aussi de ne pas laisser les agrégateurs comme Tunein Radio ou Radioline vampiriser les flux radio mais de rappatrier les audiences dans un environnement qui reste sous la tutelle directe de chaque radio. Les stations gardent ainsi la maitrise de leurs logos, de leurs diffusions et de leurs publicités. 

L'appli de Radio France à 1 million de téléchargements

Chaque radio développe son appli. Celle de Radio France affiche aujourd'hui 1 million de téléchargements, soit +100 % en un an. Quinze millions de sons sont écoutés chaque mois sur cette application, dans une audiothèque qui en compte 1,5 million. Prochaine étape : une plateforme commune aux antennes du groupe, et non plus en silos, sera proposée fin 2022. Elle permettra un parcours d'écoute plus large. Quant aux podcasts de Radio France, ils représentent 90 millions d'écoutes par mois, soit une multiplication par cinq depuis 2015. Pour Laurent Frisch, directeur du numérique et de la production de la Maison de la Radio « Sur 100 minutes écoutés sur Radio France, 15 à 20 minutes se font en digital avec, en tête des antennes, FIP. France Culture est l'antenne de radio parlée du service public la plus écoutée en digital ». Parmi les autres chantiers prioritaires, l'amélioration de la qualité du son en streaming « pour monter en gamme. On a fait des tests de son spacialisé sur FIP » souligne-t-il. 

NRJ, leader sur les enceintes connectées

Mêmes problématiques pour Nicolas Haby, le directeur général d'eNRJ et NRJ Global. « Nous travaillons à optimiser la distribution de nos webradios, en mettant à disposition leur intégralité, notamment sur nos agrégateurs. Nous proposons une pression publicitaire moins forte que les agrégateurs. Nous réfléchissons à une meilleure qualité de son avec le HTTP Live Streaming, que nous allons peut-être adopter. Par ailleurs, notre offre de 587 webradios s'apparente à une personnalisation proche des playlists des plateformes. Elle génère 50 à 60 millions d'écoutes mensuelles. Soit on en garde une dizaine que l'on markete différemment, soit on en développe davantage.

Cette réflexion implique de gros enjeux techno. »

Enfin, le groupe NRJ s'impose en leader sur les enceintes connectées. C'est l'intérêt de s'y être positionné dès leur lancement et de proposer de la musique, le contenu le plus demandé. Mais Nicolas Haby veut aussi y proposer des podcasts natifs avec du contenu parlé. Outre les déclinaisons d'émissions, le groupe défriche avec succès les nouveaux territoires de la jeunesse avec Conte-moi l'aventure! sous la marque Chérie FM et  Feu de camp pour les fans de paranormal sous la marque NRJ. 

Car l'enjeu pour les antennes est de se positionner en digital avec une offre large pour couvrir le spectre de leur proposition en FM. Mais il s'agit aussi de se déployer sur d'autres verticales porteuses et sur tous les canaux de distribution. Avec des propositions qualitatives fortes de technos intuitives. C'était la stratégie de Netflix pour la vidéo. De quoi inspirer...

Des revenus publicitaires en forte croissance.

« Le préroll se développe beaucoup, et c'est le format le plus cher en audio digital » explique Frédéric Hergaux, directeur radio cinéma à Publicis Media. Car si, sur les podcasts, on peut faire passer la pub, sur les applis, le préroll est incontournable et se vend cinq fois plus cher. L'augmentation des investissements en préroll sur le flux live et en podcasts peut atteindre +30 à +40 % en 2021 par rapport à l'année dernière. Plus généralement, sur les flux digitaux, sites ou agrégateurs, le prix est plus élevé car le niveau d'émergence de la publicité est plus fort, avec un contact effectif et non déclaratif. Enfin, l'audio des sites de presse, avec des podcasts comme Code Source du Parisien ou La Story des Echos, intéresse de plus en plus les agences médias.

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.