Dossier Télévision
La création audiovisuelle devrait voir son horizon s’élargir avec la transposition de la directive SMA, qui diversifie ses sources de financement en demandant aux plateformes digitales de mettre la main à la poche. Avec quelles conséquences pour les créateurs ?

Autour de 20 % à 25 %. C’est la part de leur chiffre d’affaires réalisé en France que les plateformes de vidéo à la demande devront consacrer au financement de la création audiovisuelle et cinématographique. C’est ce que va permettre l’ordonnance de transposition en France de la directive européenne SMA (service des médias audiovisuels) de 2018, publiée au Journal officiel le 23 décembre 2020. À titre d’exemple, cela pourrait représenter, selon la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, une contribution de 150 à 200 millions d’euros par an pour Netflix. « C’est un moment de bascule, estime Alain Rocca, directeur délégué à la formation, à l’enseignement et au conseil de l’Institut national de l'audiovisuel (INA). Pour la première fois, la directive SMA ancre la régulation des plateformes. Pour moi, c’est équivalent de l’arrivée de la TV payante et de Canal+. Il y a eu des petits cailloux comme l’apparition du crédit d’impôt mais là, les usages changent fortement. »

Dégringolade

Ce basculement intervient dans une période très chahutée. Tandis que les confinements successifs ont boosté la demande en vidéo, au cinéma, les entrées ont dégringolé de près de 70 % en 2020, selon le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée), en raison de la fermeture des salles.

Cette nouvelle manne financière pour la création audiovisuelle et cinématographique ne devrait pas être sans conséquence pour les créateurs eux-mêmes. « Les usages actuels vont être au cœur du sujet. Les plateformes savent observer les usages, ce que les gens ont apprécié, la durée des programmes... Cela nous met aussi dans l’optique de répondre aux plus jeunes », confie David Bensoussan, producteur et fondateur de Goldenia Studios.

Exclusivité

La question se pose de savoir si des formats, des thématiques ou des genres, seront privilégiés, même si l’on pourrait ne pas observer de sitôt de bouleversements en la matière - la série, par exemple, est un exercice très codifié - et si les émissions de flux, rares sur les sites de streaming vidéo, pourront, elles aussi, bénéficier de cette nouvelle manne. Par ailleurs, les plateformes, même si elles sont de plus en plus nombreuses, multipliant ainsi les débouchés de la création, pourraient désirer l’exclusivité. Reste à voir comment les créateurs parviendraient à concilier ce facteur avec l’enrichissement des contenus.

Un dernier enjeu majeur est que ces budgets arrivent, dans les faits, à ceux qui créent les programmes, y compris ceux qui ne font pas partie des interlocuteurs naturels des plateformes. « À nous de faire en sorte que le rapport de force soit équitable et que l’on puisse faire descendre un point de vue artistique et créatif», estime David Bensoussan.

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