Le pays serait-il confronté, depuis quelques mois, à une tendance étonnante de vouloir se séparer de ses champions économiques ? Face à l’urgence écologique et sociétale, une réponse stricte semble se dessiner, celle de privilégier le dogmatisme et l’urgence irraisonnée au lieu de faire face aux enjeux de manière pragmatique. Aéronautique, automobile, publicité, numérique : chacun de ces secteurs, pourtant porteurs de notre balance commerciale, semblent se poser comme les ennemis à abattre. Le secteur du digital français en tête de file.
Ne nous fourvoyons pas : notre processus démocratique demeure l’une des meilleures garanties de l’équilibre de notre système. Nous nous réjouissons de voir nos élus solliciter l’avis de 150 citoyens tirés au sort pour contribuer à dessiner ce que sera notre société d’ici la prochaine décennie. Nous sommes fiers de voir que la protection de la vie personnelle s’impose comme l’une des préoccupations majeures des internautes, un phénomène qui s’accélère depuis des années, notamment en France. Par ailleurs, notre démocratie s’est toujours appuyée sur les éclairages et les décryptages apportés par les experts et les érudits de chaque domaine. Pour preuve, les scientifiques et leur rôle dans la crise sanitaire que nous traversons. Il doit en être de même aujourd’hui dans d'autres secteurs.
Creuset d’innovation
En tant que représentant de la filière française du marketing mobile, il convient de rappeler ce à quoi le secteur est confronté. Ce dernier représente plusieurs milliers d’entreprises, 700 000 emplois directs et indirects, et s’appuie sur un héritage culturel publicitaire vieux de plus d’un siècle. Faut-il nécessairement mettre à terre le fruit de réussites françaises ? Que ce soit par l’audace des pères fondateurs de la discipline – Havas, Decaux, Bleustein – ou par nos champions d’aujourd’hui, à l’instar de Voodoo, Doctolib, ContentSquare ou de Mirakl, le marketing numérique est un creuset d’innovation qui permet de renforcer la crédibilité de l’Europe sur la scène numérique. Il a permis de développer des technologies de rupture, de faciliter l’expérience du citoyen dans son rapport à l’achat, de faire naitre des vocations ou encore de soutenir les commerces, comme ce fut le cas durant le confinement.
Ces apports, malheureusement, se sont vus gratifiés par une défiance. D’une part, celle des membres de la convention citoyenne, qui portent aujourd’hui le projet de réguler la publicité d’une façon si stricte qu’il en résulterait un cataclysme pour notre secteur. D’autre part, le régulateur français semble s’inscrire dans la même mouvance. Proposant une des interprétations les plus rigides du RGPD en Europe, la récente recommandation publiée début octobre par la Cnil incite nos plus belles réussites à l’exil, vers des terres plus clémentes aux développement des technologies et des innovations portées par ces entreprises. La filière, dans un souci d’échange sain et équilibré, s’est impliquée dans un processus de dialogue avec la Cnil qui a, au final, donné naissance à une interprétation restrictive et contraignante pour chaque acteur de la donnée en France.
Intention cachée
Au-delà de ce simple constat, il convient de s’interroger sur la profonde intention cachée derrière ces positions. Reflètent-elles une volonté de protéger le citoyen ou de le déresponsabiliser ? S’appuient-elles sur une réflexion étayée ou sur des dogmatismes ? Seul l’avenir sera en mesure de nous le dire.
La science de la donnée s’appuie sur la précision, l’exactitude et le pragmatisme. La réalité, ce sont des milliers d’emplois et des innovations stratégiques qui sont menacés sur l’autel de la précipitation. Nous, les acteurs du marketing mobile, appelons à une meilleure considération de la filière au sein du processus réglementaire. Quittons la voie de l’opposition systématique pour trouver le chemin d’un dialogue raisonné, transparent et confiant, permettant la protection de nos concitoyens et l’émergence d’innovations qui nous permettront d’assurer à notre économie un avenir numérique serein. C’est le souhait principal de notre filière.