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Sous la pression des chaînes de la TNT, les historiques tentent de sécuriser les audiences de leur prime-time. Vitrine pour les annonceurs, cette tranche horaire est un enjeu économique fort.

The Voice a donné de la voix. La première émission du nouveau concours musical de TF1, samedi 26 février, a réuni 9,1 millions de téléspectateurs, avec une part d'audience de 38%. Des chiffres qui donnent le sourire aux dirigeants de la chaîne... et permettent à sa régie d'augmenter de 38% les tarifs des écrans publicitaires de l'émission!

The Voice est un enjeu économique important pour TF1. La chaîne et le producteur, Shine France, n'ont pas hésité à casser leur tirelire. Les quatre jurés, Jenifer, Florent Pagny, Garou, Louis Bertignac, seraient payés entre 300 000 et 500 000 euros. Un effort obligatoire pour TF1.

Attaquée par les nouvelles chaînes de la TNT, la Une a perdu 8,6 points de parts d'audience entre 2005 et 2011. Première chaîne française avec près de 57 millions de téléspectateurs mensuels, TF1 a subi une baisse d'une douzaine de minutes de son écoute quotidienne, dont près de 4 minutes pour la seule tranche du prime-time (20h30-22h30). Constat identique sur France 2 (– 2 minutes) et, dans une moindre mesure, sur M6 (– 30 secondes).

La vitrine que représente le prime-time revêt une importance considérable pour les chaînes historiques. C'est l'horaire le plus regardé: en moyenne, près de la moitié des téléspectateurs sont devant leur poste entre 21h00 et 21h20, même si on observe des différences selon les jours de la semaine.

Aujourd'hui, TF1 et M6 performent toujours en prime-time. Sur cette tranche horaire leurs parts d'audience sont supérieurs à celles de l'ensemble journée. C'est heureux, car le prime time représente 20% de l'audience totale quotidienne de TF1, près du quart de celle de M6... et plus de 40% des recettes publicitaires brutes de chacune des deux chaînes, selon Yacast (voir graphique). Une vache à lait.

«Cette case horaire est extrêmement importante pour nous, confirme Fabrice Bailly, directeur adjoint des programmes de TF1. C'est là que se retrouve le plus de monde, et nous avons l'ambition de réunir tous les publics.»

Avec un niveau d'audience optimal, la première partie de soirée est évidemment la période la plus chère pour les publicités. «C'est même de plus en plus cher, souligne Jérôme Falcou, directeur de pôle TV chez Mediacom. Les coûts au GRP ont augmenté entre 5 et 10% ces deux dernières années.» Le téléspectateur est surcoté: en peak-time, tranche culminante de l'audience quotidienne, le coût du GRP est près de 50% plus cher par rapport au cœur de la journée.

Mais les annonceurs en redemandent. «Ils souhaitent aussi acheter des écrans en soirée pour la visibilité de leur communication en interne ou par rapport à leur force de vente», confie Olivier Roberdeau, directeur TV chez OMG. En somme, rien ne vaut un écran bien exposé à la télévision, non seulement pour faire vendre mais aussi pour gonfler le moral des vendeurs.

Même très cher, le prime-time reste une tranche quasiment incontournable d'un point de vue médiaplanning. Elle a le mérite de toucher les petits consommateurs de télévision, principalement les cibles actives, et donc d'augmenter les points de couverture. «En début d'action, les spots diffusés en prime-time permettent d'installer rapidement la campagne en touchant un maximum de personnes», explique Jérôme Falcou.

L'arrêt de la publicité après 20 heures sur France Télévisions, effectif depuis janvier 2009, avait un peu déséquilibré le marché en supprimant une offre recherchée. Mais, aujourd'hui, l'offre de GRP disponible en prime-time a retrouvé un niveau d'avant l'arrêt. TF1, M6 et les chaînes de la TNT ont organisé leurs grilles pour répondre à la demande.

Sans publicité, à France Télévisions, les enjeux ne sont plus les mêmes en soirée. «Mais nous avons une autre mission: être fédérateur, affirme Emmanuelle Guilbart, directrice générale déléguée aux programmes de France Télévisions. Le prime-time est notre vitrine d'image. Nous devons proposer une offre de programmes la plus large possible. Il faut être différent, mais sans se couper de notre public, et en touchant le maximum de téléspectateurs.»

Du coup, le service public tente de se démarquer éditorialement grâce à une offre de fictions. Dans ce cadre, France 2 a diffusé depuis début janvier deux séries: Les hommes de l'ombre et Des soucis et des hommes. France 3 parie sur une nouvelle saison d'Un village français.

«Le développement de séries et de fictions est un des enjeux majeurs pour les prime-time des chaînes, estime Pascal Josèphe, président du cabinet IMCA. Le cinéma, avec des films multirediffusés, n'est plus aussi efficace sur les chaînes historiques et elles ont besoin de formats de divertissement longs et originaux. Or, ce type de concept est très rare.»

La télévision française se caractérise en effet par ses longues soirées, portées par des films de cinéma (quasiment inexistants sur les chaines étrangères), les fictions de 90 minutes ou les divertissements... interminables.

Sur ce point, les chaînes ont compris la leçon. «Notre objectif est évidemment de garder le téléspectateur le plus longtemps possible, indique-t-on chez M6. Il existe plusieurs techniques pour cela, notamment les soirées thématiques.» Pas étonnant de voir sur M6 le concours culinaire Top Chef suivi à 23h40 par une rediffusion d'Un dîner presque parfait. Une cuisine interne. Le 27 février, le prime-time présenté par Stéphane Rotenberg a d'aillleurs réuni 4,4 millions de téléspectateurs, pour une part d'audience de 20,1%. Un record.

En revanche, pour le cinéma, M6 comme TF1 ont laissé le terrain aux chaînes de la TNT. Celles-ci en ont fait un produit d'appel pour leur prime-time, principalement le lundi et le jeudi. Mais cela ne suffit pas. Pour se construire une identité, elles doivent aussi miser sur une grille claire avec des programmes phares et identifiés. C'est le rôle réservé au magazine Tellement vrai sur NRJ 12 installé de manière pérenne le jeudi soir.

«Il faut être fort et visible, résume Gérald-Brice Viret, directeur délégué du pôle TV de NRJ Group. Notre programmation se fait en complémentarité des grilles des chaines historiques. Il est impossible d'être en frontal.»

En construction d'audience, les chaînes de la TNT n'ont que le prime-time comme seule et unique vitrine pour recruter. TMC et NT1, chaînes du groupe TF1, réalisent, respectivement, 30% et 40% de leurs audiences globales entre 20h30 et 22h30. «Le principe de rendez-vous est primordial et fondamental, assure Caroline Got, directrice générale de TMC et NT1. Aujourd'hui, le téléspectateur sait ce que l'on propose. Ce travail de repère a été effectué sur TMC. Il est en train d'être réaliser sur NT1.»

Mais la TNT se glisse aussi dans la peau des chaînes historiques en allant sur le territoire de l'événementiel et du sport. W9 attend beaucoup de son divertissement A la recherche du nouveau Claude François. Quant à Direct 8, le succès du foot féminin sur son antenne pourrait donner des idées à Canal+, le nouveau propriétaire de la chaîne.

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