[Tribune] Le monde de l’influence marketing est en train de passer un cap : l’émergence d’une conscience d’un impact positif sur ses communautés, la société et la planète. C’est une excellente nouvelle pour tous, agences et annonceurs compris, à condition que chacun y apporte sa contribution.
Depuis deux ans, un mouvement essentiellement porté par les agences et les annonceurs prône une approche plus responsable de la relation influenceur dans le cadre de partenariats entre marques et créateurs de contenus (charte élaborée par le Syndicat du conseil en relations publics, travail de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité). Depuis un an, on constate une forte accélération de cette montée en responsabilité, et celle-ci est désormais à l’initiative des producteurs de contenus eux-mêmes et des consommateurs de ces dits contenus.
Les signes permettant de parler d’une accélération sont nombreux mais on pourrait citer l’édition 2021 du Z Event, qui a porté un coup de projecteur massif sur cette responsabilité 2.0 des influenceurs. Du fait de sa taille, des montants récoltés pour les associations (plus de 5 millions d’euros récoltés au profit d’Amnesty International en 2020, quasiment le double en 2021 pour Action contre la faim) et surtout de la trace laissée aussi bien auprès des communautés des créateurs impliqués que des médias traditionnels grand public, la collecte de fonds organisée par le streamer ZeratoR a contribué à changer le regard de l’opinion publique sur les influenceurs.
Sans filtre
Depuis début 2022, d’autres initiatives vont dans ce sens. Le nombre des créateurs suivant la certification Influence Responsable de l’ARPP augmente régulièrement, et celle-ci attire des locomotives du secteur de l’influence comptant plusieurs centaines de milliers de followers. De plus en plus d’agences et plateformes incitent leurs partenaires à suivre ces modules et certains annonceurs réclament cette certification comme sésame pour pouvoir travailler avec eux. Autre exemple à l’international, dans la foulée de sa campagne « Reverse selfie » pour Dove sensibilisant aux ravages d’une beauté « instagrammée » sur l’estime de soi des adolescentes, Ogilvy a décidé de ne plus travailler avec des influenceur-ses ayant recours à des logiciels de retouche.
Plus récemment en France, au début de l’été, le hashtag #balancetoninfluenceur, qui a généré plus de 60 000 tweets en 24 heures, a déclenché une phase de libération de la parole quant à certains agissements toxiques. En parallèle, de plus en plus de créateurs « star » sont interpellés par leur communauté sur les dégâts environnementaux induits par leur activité, que ce soit des tournages à l’autre bout du monde, des accusations de greenwashing ou le soutien à une surconsommation de plus en plus décriée par les jeunes générations.
Finalement, c’est comme si une partie de l’écosystème des créateurs digitaux découvrait la force de son impact sur le monde. Car c’est bien d’impact dont il est question ici, et non pas d’image comme cela a été majoritairement le cas jusqu’à maintenant. L’impact ne se mesure pas aussi facilement que le reach, les partages ou les likes ; il se caractérise par trois dimensions : l’impact sur les gens (de sa communauté à la société dans son ensemble), sur la planète et sur la performance de ses produits (ou contenus dans le cas des influenceurs). People, Planet, Performance : ces trois P constitutifs d’un impact positif sont bien ceux autour desquels une partie du marketing d’influence est en train de se (re)structurer.
Alors bien sûr, cela ne concerne encore qu’une minorité et les dérives sont encore nombreuses, mais charge à nous tous, acteurs de cet écosystème, d’aider à rendre ces initiatives pérennes et à la généraliser. Comment ? Toutes les idées sont les bienvenues, mais commencer par redéfinir les metrics des créateurs avec lesquels nous collaborons à l’aune de ces 3 P serait un bon début auquel toutes les parties prenantes de l’écosystème, créateurs et plateformes compris, pourraient prendre part.