TRIBUNE

Longtemps l'apanage des maisons de luxe, la personnalisation gagne aujourd'hui tous les secteurs, avec la promesse de lutter contre la fast fashion. Reste un certain nombre de défis à relever pour les marques.

Pendant longtemps, la personnalisation a été présentée comme une expérience réservée au monde du luxe. Aujourd’hui, elle tend à devenir la norme dans de nombreux domaines. Garantissant un plus fort attachement au produit ou au service, mais aussi un engagement renforcé avec la marque, le sur-mesure devient aussi le meilleur moyen de lutter contre la fast fashion. Seulement, plus le nombre de combinaisons proposées est élevé, plus il devient difficile de faire vivre cette promesse…

L’âme, l’arme durable pour lutter contre la fast fashion

Personnaliser un objet, c’est le rendre unique, en faire une extension de sa propre personnalité et de ses convictions. L’objet ainsi transformé n’est plus soumis à la volatilité de la mode, il devient sa propre norme, intemporelle. Lorsqu’un produit présente des attributs qui nous ressemblent, le lien que nous tissons avec lui est renforcé et infiniment plus étroit. Nous le gardons plus longtemps. Modèle d’une nouvelle génération soucieuse de son empreinte environnementale, la personnalisation limite l’impact de la fabrication, tout en offrant un choix unique au client. Elle séduit ainsi parce qu’elle apporte un supplément d’âme à un bien matériel, qui rend l’objet d’autant plus précieux et durable.

C’est là sa plus grande arme pour lutter contre la fast fashion et le désastre écologique qu’elle engendre. D’autant que la personnalisation n’est plus l’apanage des grandes marques du luxe. Tout ce que nous portons peut désormais être customisé : tote bags, sneakers, sweat shirts, broches, rouges à lèvres, stylos, montres…

Un défi : rendre visible et accessible cette personnalisation

Les marques ont compris l’intérêt de fabriquer nativement des produits durables et personnalisables. Pour certaines, cette démarche s’inscrit dans leur ADN, avec une production à la demande pour éviter le sur-stock. Si la personnalisation représente clairement une voie à suivre dans un monde où l’affirmation de soi est très forte, elle présente néanmoins un défi majeur : comment montrer l’intégralité des possibilités offertes ?

Lorsque le joaillier Fred ou la cristallerie Baccarat offre plus de 4 000 combinaisons possibles sur un bracelet ou un lustre, il est facile d’imaginer la complexité qu’il y a pour un client de tester toutes les propositions. Plus le niveau de personnalisation est élevé, plus l’exercice se révèle complexe. À cela s’ajoute une Gen Z qui a pris l’habitude de consommer depuis son smartphone et qui attend donc de pouvoir retrouver cette promesse directement sur le site web de la marque et non plus uniquement en boutique.

Un modèle de personnalisation 3.0

Pour faire vivre cette promesse, certaines marques optent aujourd’hui pour les technologies de visualisation 3D hautement immersives, qui autorisent à l’écran toutes les combinaisons possibles, jusqu’au changement de couleur des aiguilles d’une montre. Les outils actuels offrent des rendus à l’écran au plus près de l’objet réel, et donnent même la possibilité de le «manipuler» virtuellement comme on le ferait en boutique. Cette expérience est désormais renforcée et complétée par la technologie de virtual try-on, qui permet d’essayer «virtuellement» un bracelet, un collier, un rouge à lèvres ou une paire de sneakers à l’aide d’un simple smartphone. Autant de technologies qui agissent comme des leviers de réassurance pour l’acheteur en ligne.

Cette digitalisation du processus de commande est également nécessaire pour transmettre, efficacement et sans risque de retour, les caractéristiques de l’objet qui sera fabriqué à la demande, dans une usine organisée pour ces productions à l’unité.

Vers de nouveaux équilibres économiques

Ces procédés permettent par ailleurs d’autres économies. Dans ce schéma, en effet, le réseau de distribution physique ne se fait plus aussi essentiel et la possession immédiate n’est plus la règle. Si ces dispositifs de virtualisation et de projection 3D seront rapidement incontournables pour les digital native brands, ils pourraient donc, dans un avenir proche, favoriser la réduction du nombre de points de vente des marques traditionnelles.

Ils contribuent ainsi à la mise en place de nouveaux équilibres économiques, avec des chaînes de valeur différentes, qui pourraient devenir très favorables au consommateur avec des produits plus qualitatifs et des coûts optimisés car débarrassés des loyers onéreux, des boutiques physiques, des stocks et des taux de retours élevés. Avec, à la clé, une satisfaction client renforcée.

Le futur de la personnalisation ne présente ainsi que des avantages et sera sans aucun doute un facteur de succès si l’expérience digitale se révèle d’excellente qualité. Toutefois, ce n’est jamais facile de rendre simple la configuration d’un produit qui peut, dans certains cas, se révéler très complexe. Les enjeux d’ergonomie et de fluidité de l’expérience sont donc clés pour la réussite de ces nouveaux concepts où l’amateurisme n’a clairement plus sa place.

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